NEWS
Les actualités
 d’ADHEOS

Même s’ils n’adhèrent pas tous, la plupart des maires charentais interrogés appliqueront la loi.
 
Le projet de loi autorisant le mariage homosexuel sera finalement présenté en conseil des ministres en janvier 2013. Mais est-on prêt, dans les mairies charentaises, à accepter un tel bouleversement ? Jean-Marc Ayrault titille la fibre républicaine des édiles. Le premier ministre est convaincu que les maires seront « soucieux d’appliquer la loi » et dépasseront leurs éventuelles réserves morales.
 
À quelques semaines de l’examen du projet de loi, nous avons donc posé cette question à 50 maires charentais : accepterez-vous de célébrer le mariage d’un couple homosexuel ? Si cet échantillonnage, qui regroupe les chefs-lieux de canton et des communes rurales piochées ça et là, n’a pas valeur de sondage scientifique, il met à jour quelques certitudes. Et conforte l’actuel premier ministre : la plupart des maires interrogés sont légalistes et appliqueront la loi. Avec plus ou moins d’entrain : sur les 34 maires qui se disent prêts à unir deux individus du même sexe, une quinzaine admet des réticences. Analyse des réponses de nos édiles…
 
1. Ils acceptent et approuvent
 
Sans surprise, les maires socialistes des deux principales villes charentaises n’ont aucune hésitation. « Si je suis présent, c’est moi qui officierai pour le premier mariage homosexuel à Cognac », affirme Michel Gourinchas.
 
« Le mariage est un acte fort : on ne peut pas refuser à des gens cet engagement de vie », ajoute Philippe Lavaud (Angoulême). « Le mariage, c’est un contrat entre deux personnes, désacralise Jérôme Royer (Jarnac). Et il vaut mieux un mariage homosexuel réussi qu’un couple hétéro désuni. »
 
De l’avis de ces maires, le législateur ne fait que suivre l’évolution de la société. « Le Pacs a fait son temps, il faut passer à autre chose », estime Michel Broncy (Ruelle). « Je ne vais pas m’opposer à un droit revendiqué. C’est une question de tolérance », plaide Bernard Lacoeuillle (Saint-Amant-de-Boixe).
 
Maire étiqueté à droite, Didier Jobit (Magnac-Lavalette) ne dit pas le contraire et va même plus loin : « je suis chrétien pratiquant et je suis pour. Notre société est prête à franchir le pas. C’est bien que les tabous tombent. Ne soyons pas hypocrites, il faut que les homosexuels puissent être un jour papa ou maman. La France doit effacer cette différence de traitement. »
 
2. Ils acceptent par légalisme républicain
 
Certains préfèrent le terme « union civile » à celui de mariage qui « véhicule des valeurs traditionnelles » (Patricia Duclos à Hiersac ou Daniel Sauvaitre à Reignac). D’autres admettent qu’ils ne sont « pas du tout enchantés par cette perspective » et qu’ils s’exécuteront « avec beaucoup de réticences » (Jean-Louis Dutriat, Confolens).
 
Des réticences, Jean-Pierre Compain en a. Et la métaphore utilisée par le maire de Massignac témoigne de la différence de perception sur le sujet, entre le Marais parisien et la Charente limousine : « Comme on dit chez moi, si on veut des petits veaux, il faut commencer par avoir un taureau et une vache. » « Ce n’est pas ma tasse de thé, ajoute Jean-Paul Kerjean (Roullet). J’appliquerai la loi et c’est tout. L’homme et la femme ont été créés pour autre chose que ce genre de manifestation amoureuse. » À Ruffec, Bernard Charbonneau estime que « le Pacs était largement suffisant »…
 
À Saint-Claud, Joëlle Chardat pense qu’avec ce projet de loi, « on tombe dans la déliquescence ». Mais elle sera légaliste et ne refusera pas de célébrer une union homosexuelle. « Le maire est là pour appliquer la loi même si mes convictions personnelles font que je ne suis pas pour le mariage homosexuel », résume Véronique Marendat, synthétisant l’avis de beaucoup de maires.
 
« Tous les goûts sont dans la nature, admet Michel Gealageas (Chabanais). Ça me dérangerait moins de marier deux femmes que deux hommes parce que je pense à l’adoption (sic). Mais bon, le soleil doit luire pour tout le monde. Et pour le premier mariage gay, je serai dans mes petits souliers. »
 
Il reste que, selon Jean-Michel Bolvin (Saint-Amant-de-Montmoreau), « ces débats sur le mariage homosexuel, la dépénalisation du cannabis ou le vote des étrangers sont des écrans de fumée. Nous avons bien d’autres soucis économiques. »
 
3. Ils ne se prononcent pas (encore)
 
Peur de s’engager sur un terrain glissant ou de choquer les administrés ? Attente prudente de la publication de la loi ? Neuf des 50 maires interrogés refusent de répondre à la question posée. « Sujet secondaire » pour Jean Gombert (Javrezac). À Villefagnan, Christiane Prévost demande à « y réfléchir ».
 
4. Ils refusent catégoriquement
 
« Pour moi, le mariage, ce n’est pas ça », appuie Daniel Boyer (Châteaubernard) qui fait déjà le tour de son Conseil municipal pour savoir qui voudra célébrer une union homosexuelle.
 
À Saint-Séverin, Alain Rivière plaide pour « un Pacs aménagé qui apporte les mêmes droits que le mariage… On pourrait même envisager un référendum pour connaître l’avis des Français. » Beaucoup plus virulent, Pierre Jaulin (Baignes) dit « avoir une autre idée de la famille. Et qu’on ne me dise pas que l’on marie bien des vieux qui ne peuvent pas procréer (sic). Si la loi autorise le mariage homosexuel, je trouverai bien un subterfuge. Avant d’envoyer le couple ailleurs, je demanderai à mes adjoints. Mais je serais bien surpris qu’ils acceptent. » Parce qu’il ne « voit pas comment deux hommes ou deux femmes peuvent faire un enfant », Robert Guilloton (Salles-d’Angles) refusera d’unir deux homosexuels : « Si la loi passe et si aucun adjoint ne veut me remplacer, je demande une exception pour ma commune. » Pas sûr que le législateur fasse grand cas de la demande…
 
Henri de Richemont (Étagnac) est, lui, vent debout contre la mesure : « C’est une négation de la famille. Un enfant a besoin de l’amour d’une mère et de l’attention d’un père. Un maire (Noël Mamère, NDLR) a illégalement célébré un mariage homosexuel et n’a jamais été sanctionné. Je ne vois pas pourquoi je serais sanctionné le jour où je refuserai d’en célébrer un. »