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 d’ADHEOS

 Mais pourquoi ces deux hommes ont-ils séquestré Guy et Luc et infligé une mort atroce à ce couple de gays tranquilles, début 2009? Apparemment pas par homophobie, selon la défense
 
La mort atroce d’un couple d’homosexuels, enterrés vivants en 2009 près de Bourges pour une sombre histoire de règlement de compte familial, a hanté la première journée du procès des deux accusés, Claude Juillet et Christophe Rayé, aujourd’hui devant les assises du Cher.

 
 
La lecture de l’acte d’accusation a ravivé des souvenirs éprouvants pour la dizaine de parties civiles, membres des familles des deux victimes, Guy Bordenave, 39 ans, et Luc Amblard, 56 ans.
 
Fusionnels et discrets
Ces deux organisateurs de spectacles formaient un couple «fusionnel» et «discret» selon des témoins. Ils vivaient dans le petit village de Couy, à une trentaine de kilomètres à l’est de Bourges.
 
Ils ont été séquestrés pendant toute la nuit du 7 au 8 mars 2009, puis enterré vifs sur une berge sablonneuse de la Loire à la Charité-sur-Loire dans la Nièvre. Face à face, assis, la bouche bâillonnée. L’autopsie montrera qu’ils sont morts étouffés, sans pouvoir appeler à l’aide. Leurs corps seront retrouvés trois mois plus tard. A l’évocation des faits, plusieurs parties civiles ont les larmes aux yeux.
 
Ancien employé
Dans le box des accusés, Claude Juillet, ancien intermittent du spectacle sans emploi, 55 ans. Jeans, basket, petites lunettes, petite taille, il est l’ancien employé des victimes et l’ancien compagnon de Marie-Laure Bordenave, sœur de Guy.
 
Il reconnaît la séquestration et l’ensevelissement du couple, qui voyait selon lui d’un mauvais œil sa relation avec Marie-Laure, et aurait persuadé celle-ci d’y mettre fin. Ce qu’elle avait fait en 2008. Ils représentaient «un entourage négatif qui n’arrêtait pas de foutre la merde» dans leur couple, dira-t-il lors de l’enquête. «Qui tiendriez-vous responsable de cette séparation?», lui demande l’avocat de Rayé, Jean-Michel Fleurier. «Les victimes», souffle Juillet. «Est-ce que ça justifierait leur mort?», renchérit le président Jacques Lavigerie. «Non», lâche-t-il, les yeux baissés.
 
Examen des personnalités
Dans le box des parties civiles, les familles des victimes hochent la tête, consternées. Parmi elles, Marie-Laure Bordenave se lève et livre une tout autre version des raisons de leur séparation. «Il ne travaillait pas. J’en avais marre de bosser (seule) alors j’ai décidé qu’on vivrait chacun chez soi.»
 
Une partie de la première journée d’audience a été consacré à l’examen de la personnalité complexe de cet ancien intermittent du spectacle. Impulsif, colérique, antisocial, énigmatique, pour les uns. Père attentionné d’une petite fille, «pas mauvais bougre» pour les autres. «Trop gentil», dit Juillet de lui-même (sic).
 
A ses côtés, Christophe Rayé, 39 ans, ancien cariste sans emploi, ancien ami de Juillet. Grand, cheveux courts, petites lunettes, il s’exprime avec un léger accent de son Sud-ouest d’origine. Il reconnaît la séquestration du couple, auquel il a d’ailleurs volé de l’argent, mais nie avoir participé à l’ensevelissement.
 
«Pas d’homophobie»
Cette affaire sordide avait d’autant plus défrayé la chronique que l’hypothèse d’un crime homophobe avait un temps circulé dans certains médias et sur internet. En 2010, le maire de Paris Bertrand Delanoë avait même cité ce fait divers sur son site pour illustrer la mauvaise intégration des homosexuels.
 
Une hypothèse battue en brèche par l’enquête, et démentie par l’avocate de Claude Juillet. «Ni dans le dossier, ni dans l’esprit de mon client, il n’a jamais été question d’homophobie», a expliqué Me Karine Berthon.
 
Jugés pour enlèvement et séquestration suivie de mort, les deux accusés risquent la réclusion à perpétuité. Le verdict est attendu jeudi.