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 d’ADHEOS

 L’un des «papas» du pacs, Jean-Pierre Michel (PS), propose de permettre aux couples pacsés d’adopter. La proposition de loi sera bientôt discutée au Sénat… Pour TÊTU, il explique en quoi ce débat est utile, même si le texte devrait être rejeté.
 
 Autoriser l’adoption par les partenaires liés par un pacs? C’est l’objet de la débat prévu dans trois semaines, le 25 mars, au Sénat. Le débat se basera sur une proposition de loi déposée mi-décembre 2009 par le groupe socialiste et apparentés, qui souhaite simplement compléter l’article 343 du code civil – «l’adoption peut être demandée par deux époux…» – par ces mots: «…ou par deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité depuis plus de deux ans».

 
 
Hélas, il n’y a guère de suspense quant à l’issue de ce débat… En effet, le rapport de la commission des lois du Sénat, dont l’UMP Marie-Hélène des Esgaulx est rapporteure, vient de dévoiler la position qui sera exprimée par la majorité lors du débat. Si elle refuse de trancher, Mme des Esgaulx énumère dans ses conclusions des arguments contre l’adoption par les pacsés, au sujet de «l’exigence de sécurité pour l’enfant»: le pacs, selon elle, n’offre pas une «sécurité juridique» suffisante, c’est un contrat «essentiellement patrimonial, sans destination familiale spécifique». Elle cite aussi le fait que «d’autres dispositifs que l’adoption, comme la délégation d’autorité parentale ou la tutelle testamentaire», répondraient déjà aux besoins d’associer le partenaire à l’éducation des enfants.
 
Afin de comprendre les enjeux de ce débat perdu d’avance, TÊTU a interrogé l’initiateur de la proposition de loi, qui n’est autre que le sénateur de Haute-Saône, le socialiste Jean-Pierre Michel… déjà co-créateur du pacs.
 
TÊTU: Vous vous apprêtez à recevoir une forte opposition à votre texte…
Jean-Pierre Michel: Ce débat me rappelle celui que j’ai connu entre 1991 et 1999, quand j’essayais de créer un contrat d’union pour tous les couples, y compris homosexuels, qui a débouché sur le pacs. On me disait alors: «La société n’est pas prête, ce n’est pas le moment.» C’est ce qui a été répondu en décembre dernier déjà, lorsque la gauche tentait d’améliorer le pacs. Cela devrait être le cas encore lors du débat du 25 mars. Les conservateurs et les réactionnaires ont toujours le même discours. La droite nous fait croire qu’elle a changé, mais ce n’est pas le cas. Elle dit «Excusez-nous, on s’était trompés sur le pacs» mais en réalité, elle est toujours dans le même état d’esprit. Pour la droite, le mariage reste l’alpha et l’oméga du couple. Elle est en décalage avec la réalité puisque la majorité des couples ne sont pas mariés.
 
Comment interprétez-vous les arguments des opposants à votre proposition?
La droite considère que les couples pacsés ne devraient pas adopter, car le pacs offrirait moins de stabilité que le mariage. Or une majorité d’enfants naissent désormais en-dehors du mariage, et, avec les dix ans de recul dont on dispose, on voit que les couples pacsés se séparent moins que les mariés! De plus, 80% des pacsés sont hétérosexuels. On ne voit pas pourquoi on les empêcherait d’adopter, d’autant plus que les célibataires peuvent, eux, le faire.
 
Mais l’idée sous-jacente dans le rejet de la droite, c’est d’empêcher les couples homosexuels d’adopter. Et pour y parvenir, elle en empêche tous les couples pacsés, même les hétérosexuels! L’APGL, reçue par la commission, a noté que la question d’urgence, pour elle, était de régler le statut du beau-parent. Mais aux couples pacsés qui veulent adopter, on refuse de régler ce problème dès le départ, en leur refusant de le faire ensemble… C’est incohérent.
 
Puisque vous savez que la proposition sera rejetée, à quoi sert d’aller  quand même jusqu’au bout?
Quand j’ai soumis cette proposition de loi au groupe socialiste, tout le monde a été d’accord, sans réticence. Même si on savait bien que la majorité de droite ne l’approuverait pas. Mais le fait même d’en discuter, d’imposer un débat public, c’est un moyen d’avancer. C’est comme aux premiers temps du pacs: il a fallu remettre le sujet plusieurs fois sur la table avant qu’il semble acceptable aux plus réticents. Mais je prépare déjà une riposte législative à ce refus, toujours dans l’intérêt des enfants…