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 d’ADHEOS

Le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy a adopté un avant-projet de loi restrictif sur l’avortement. Fort de sa majorité absolue au Parlement, le Parti populaire n’aura pas de mal à faire passer cette petite révolution, qui ramène l’Espagne 30 ans en arrière. Le texte réduit les possibilités d’avortement des femmes : seules celles qui pourront prouver un viol, ou un « préjudice à la santé physique ou psychique » pourront interrompre leurs grossesses.
 
L’avant projet de loi du Parti populaire espagnol provoque de fortes protestations dans tout le pays, spécialement de la part des organisations féministes. Ce qui achoppe, c’est le passage d’une législation progressiste – celle du socialiste Zapatero, en 2010, qui situait l’Espagne dans la majorité européenne – à une législation qui ramène le pays à 1985.
 
Le pays pourrait en effet passer d’une loi par laquelle l’interruption volontaire de grossesse était légalisée jusqu’à 12 semaines de gestations, c’est-à-dire 90 % des cas d’avortements, à une loi qui abolit le droit à avorter, qui le criminalise.
 
Désormais, toute candidate à une opération ne pourra éviter le délit qu’à deux conditions : le viol ou un « préjudice à la santé physique ou psychique » de la femme enceinte. Un préjudice qu’il faudra prouver en obtenant l’autorisation de deux médecins différents, qui évoluent en dehors de la clinique consultée. C’est donc un véritable parcours du combattant, qui fait hurler l’ensemble des organisations féministes, mais aussi presque tout le spectre politique et social.
 
Fondements et motifs de cette réforme
Officiellement, à écouter le ministre de la Justice, Alberto Ruiz Gallardon, il s’agit de faire diminuer le nombre d’avortements. Mais, si l’on se penche sur les statistiques, avec environ 111 000 opérations pratiquées l’an dernier, la baisse a été de 5 %, suite à la loi du socialiste Zapatero. Il faut donc croire que les motifs sont davantage d’ordre idéologiques.
 
Le gouvernement a voulu satisfaire une partie de son électorat – la partie la plus conservatrice et radicale -, ainsi que l’essentiel de l’Eglise catholique, très influente, pour qui c’est un sujet crucial.
 
D’ailleurs, le numéro 1 de l’épiscopat, le cardinal Rouco Varela, a applaudi des deux mains en disant qu’avec cette loi,« les non-nés, les embryons ont enfin des droits : le droit à la vie ». Tant pis semble-t-il, pour lui, si ces droits s’exercent au détriment de ceux de la femme, des femmes. « C’est un texte cynique, patriarcal, rétrograde et dégradant », a dénoncé la fédération des associations féministes d’Espagne.
 
Le cas des foetus souffrants de malformations est l’un des sujets les plus épineux, et qui fait enrager tous les opposants, très nombreux, de cette loi. Car, texte en main, si le foetus souffre de malformations, la femme enceinte n’aura pas le droit d’avorter, sauf si elle peut apporter la preuve que cet embryon va mourir d’ici peu. Mais s’il peut vivre, quoique très diminué, et même s’il souffre d’une maladie mortelle, la loi interdit l’opération.
 
Ce qui fait dire aux experts que, dans ces cas-là, les femmes continueront d’avorter, mais dans des conditions précaires. Les Espagnoles ayant de l’argent pourront pratiquer l’IVG à l’étranger, pour 5 000 à 6 000 euros. Les femmes les plus humbles, c’est-à-dire la majorité, devront fréquenter des cliniques clandestines, avec tous les dangers sanitaires que cela suppose.
 
L’opposition socialiste a lancé un appel solennel aux députées du parti au pouvoir afin qu’elles s’opposent , à un « projet dirigé contre les femmes ». Mais il y a peu de chances que cet appel aboutisse.