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 d’ADHEOS

Des militant-e-s du Parti Socialiste ont publié cette semaine sur tumblr une «contribution thématique» s’opposant à la pénalisation des client-e-s de la prostitution. Le texte, intitulé «Prostitution: du déni aux réalités», sera présenté au Congrès du parti, qui se tiendra à Toulouse en octobre prochain.
 
Parmi les signataires, on trouve Gilles Bon-Maury, qui est le président d’Homosexualités et Socialisme (HES), Erwann Le Hô, (par ailleurs président du Centre GLBT de Rennes), Vincent Loiseau (ancien porte-parole de l’Inter-LGBT), ainsi que Constance Blanchard, membre du Conseil National (CN) du parti et Richard Yung, sénateur des Français-e-s de l’étranger.
 
Leur position diffère de celle exprimée jusque là par la ministre des Droits des Femmes Najat Vallaud-Belkacem ou d’autres élu-e-s du parti tel-le-s que la députée Danielle Bousquet.
 
Les signataires saluent d’abord comme «juste et équilibrée» la position du Planning Familial sur le sujet. L’association féministe a récemment réaffirmé son opposition à la pénalisation des client-e-s.
 
«DES RÉALITÉS TRÈS DIVERSES»
Les auteur-e-s de la contribution expliquent ensuite que la prostitution correspond à «des réalités diverses»: «Quand on parle de prostitution on évoque le plus souvent la prostitution de rue, mais il existe aussi des pratiques prostitutionnelles plus discrètes. Celles qui se passent dans les appartements, les salons de massage, les boîtes de nuit ou les bars, celles qui ont lieu dans des foyers de migrants, les cités, sont plus ou moins connues».
 
«Dans la prostitution on rencontre aussi bien des femmes, des hommes, des transexuel-le-s, de tous les milieux sociaux et de toutes origines. De l’escorte occasionnelle à la personne qui en fait son activité journalière, il y a toute une palette de situations dans laquelle on trouve notamment: des étudiantes, des migrantes, des femmes au foyer qui arrondissent leur fin de mois, des prostituées “traditionnelles” exerçant depuis des dizaines d’années, des hommes – homosexuels ou non – ayant une clientèle tant féminine que masculine, des femmes qui travaillent dans le commerce du porno, des personnes trans’ exclues du marché de l’emploi du fait de leur apparence… Et la liste est loin d’être exhaustive!», écrivent-ils/elles.
 
UN BILAN NÉGATIF DE LA RÉPRESSION DU RACOLAGE
Les militant-e-s dressent ensuite un bilan très négatif de la répression du racolage: «la situation des prostitué-e-s de rue s’est considérablement dégradée». «La LSI [loi pour la sécurité intérieure] a entraîné la multiplication des contrôles, des arrestations et des placements en détention ou en rétention administrative des personnes prostituées. Elles ont dû se cacher encore plus pour exercer leur activité, quitter des villes pour aller vers des territoires périphériques, changer de région et parfois de pays».
 
«La LSI nuit à l’accès aux droits, aux soins et à la prévention du VIH et des Infections Sexuellement Transmissibles (IST). En effet, la baisse des revenus des personnes prostituées, engendrée par l’application de la LSI, affecte de manière inquiétante leurs capacités à imposer le port du préservatif. De plus, l’accès aux droits, aux soins et à l’aide sociale, conditionnant le souci de soi, est rendu plus difficile, de même que la prévention du VIH et des IST».
 
PAS DE PÉNALISATION
Selon les auteur-e-s de la contribution, la pénalisation des client-e-s de la prostitution est «une mauvaise idée». Ils/elles prennent l’exemple de la Suède, où la mesure est en vigueur. Selon elles/eux, la loi, qui relève de «l’hypocrisie», a déplacé la prostitution de la rue aux «salons» et aux «ferries qui longent les côtes scandinaves». En rendant la prostitution clandestine, la loi aurait également favorisé le proxénétisme.
 
SANTÉ ET DROITS SOCIAUX
Les militant-e-s préconisent le renforcement de l’accès aux soins de santé et aux droits sociaux des personnes prostituées, comme par exemple l’Aide Médicale d’État (AME), la Couverture Maladie Universelle (CMU) et la reconnaissance de l’Affection de Longue Durée (ALD). Selon les auteur-e-s, les associations de prévention ont un rôle crucial à jouer dans l’information des personnes prostituées sur leur droits.
 
LUTTE CONTRE LE PROXÉNÉTISME
Il faut également lutter contre les réseaux de proxénétisme. Concernant les personnes étrangères victimes de trafic, les militant-e-s proposent de ne plus conditionner la délivrance d’un titre de séjour à l’incrimination du proxénète, et de proposer des programmes développant des aides spécifiques pour les personnes qui souhaitent quitter la prostitution.
 
COORDINATION DES POLITIQUES MENÉES
Les auteur-e-s proposent enfin de s’engager dans «une véritable coordination des actions et des politiques menées. Cette coordination doit être entreprise entre les différents ministères concernés (ministère des Droits des femmes, de la Santé, de l’Intérieur, des Affaires Sociales et de la Justice), les institutions et administrations territoriales, les élus locaux, les organisations non gouvernementales, les associations de terrain et les services de droits communs pour traiter des questions d’accès aux soins, aux droits, à la prévention, à l’aune de ce qui existe notamment à Paris dans le cadre des contrats locaux de sécurité».
 
Les contrats locaux de sécurité (CLS) sont l’objet de vives critiques de la part des travailleur/euses sociaux/les. Selon Pierre Billion, maître de conférences à l’IUT Carrières Sociales de l’Université de Tours, ce genre de partenariat met en danger le secret professionnel des travailleur/euses sociaux/les, contraint-e-s de fournir les informations sur les publics rencontrés avec les services de police.
 
«UNE LÉGISLATION QUI ÉMANCIPE»
Les contributeur/ices concluent: «Ce qui est choquant, ce qui n’est pas admissible sur le territoire d’une République comme la nôtre, ce n’est pas d’échanger une relation sexuelle contre de l’argent, c’est d’y être contraint et d’être abandonné face à cette contrainte. Nous sommes socialistes et nous devons avoir à cœur de promouvoir, sur cette question aussi, une législation qui émancipe, qui garantit le libre arbitre et protège l’intégrité physique et morale de chacun».