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 d’ADHEOS

 Combien d’entre vous ne se sentent pas concernées par le VIH et autres MST? Beaucoup, sans doute… Rares sont les lesbiennes qui se protègent lors de leurs rapports sexuels. TÊTUE fait le point des comportements à risques.
 
 Rares sont les lesbiennes qui se protègent lors de leurs rapports sexuels. Rares aussi sont celles qui connaissent l’usage du préservatif coupé, de la digue dentaire ou des gants en latex. Au mieux, on pense à mettre un préservatif sur le gode.
 
 Un manque d’infos sur la question criant
Devons-nous pour autant être blamées de ces comportements à risque? Le manque d’informations sur la question est criant. Avez-vous remarqué, dans les rues de Paris, la publicité actuelle sur le sida, promue par la Mairie de Paris, qui ne montre que des couples hétérosexuels ou gays? Avez-vous déjà lu une enquête quantitative sur la transmission des maladies entre lesbiennes ? Connaissez-vous un chiffre indiquant le nombre de lesbiennes infectées par des MST? A priori, non. Et même en cherchant bien, les données demeurent faibles. Natacha Chetcuti, sociologue et anthropologue à l’INSERM* (Institut national de la santé et de la recherche médicale), considère à juste titre que «les lesbiennes subissent la double peine, être femme et homosexuelle».
 
Promouvoir la santé lesbienne
Plusieurs raisons à cela. D’une part, comme le précisent Clotilde Genon, Cécile Chartrain et Coraline Delebarre dans leur article intitulé Pour une promotion de la santé lesbienne (paru dans la revue électronique Genre, Sexualité, Société – printemps 2009), «avec l’épidémie du sida, les hommes homosexuels sont devenus aussi bien l’objet d’investigations renouvelées dans le champ des recherches sur la sexualité qu’une cible prioritaire pour les politiques publiques de prévention; ce qui n’a jamais pu être le cas des lesbiennes». D’autre part, l’hétérosexisme persistant qui touche autant la société que les structures médicales conduit, selon Natacha Chetcuti, «à prendre moins en compte les problèmes de santé chez les femmes et, a fortiori, chez les homosexuelles».
 
La sexualité lesbienne, un impensé social
La sexualité lesbienne est perçue comme un «impensé social», d’après Anne Revillard, maîtresse de conférences en sociologie à l’Université Paris 13 de Villetaneuse. Pire, «l’orientation homosexuelle, en tant que critère de non-conformité au schéma social dominant, mène à (…) une prise en charge moins adaptée que pour les femmes hétérosexuelles», constatent Clotilde Genon, Cécile Chartrain et Coraline Delebarre dans le même article. Or, il est bel et bien avéré que les personnes les plus touchées par le VIH sont les femmes. Hétérosexuelles, toxicomanes. Mais aussi, les femmes qui «ont des parcours non-exclusifs», précise Natacha Chetcuti. En d’autres termes, des femmes qui fréquentent aussi les hommes.
 
Les MST touchent les lesbiennes aussi
Sous prétexte que le risque de transmission des MST reste inconnu, du fait de rapports digitaux ou génitaux communément peu traumatiques, les lesbiennes se sentent immunisées. Mais cette raison apparaît insuffisante. Car, peu de risques ne signifie pas, pas de risques. Dès qu’il y a relation sexuelle, il y a danger. La preuve: certaines IST comme les mycoses, l’herpès, le papillomavirus et autres gonococcies ou chlamydioses, sont autant de maladies possiblement contractées par la population lesbienne. En témoignent Nathalie Bajos et Nathalie Beltzer, dans l’enquête CSF de 2008: «Les femmes qui déclarent des pratiques homosexuelles (…) ont un nombre plus important de partenaires et une prévalence plus élevée d’IST que les femmes qui n’ont eu que des partenaires masculins. Elles sont 12% (versus 3% des femmes hétérosexuelles) à rapporter avoir eu une infection sexuellement transmissible dans les cinq dernières années».
 
La gynécologue n’est pas que pour les hétérosexuelles
A cela se rajoute un facteur aggravant: la négligence de son état de santé. Nombreuses sont celles qui considèrent le recours au gynécologue inutile. Dans l’imaginaire collectif, celui-ci est cantonné à la prévention des grossesses. Une idée fausse qui, en plus de réduire la vie sexuelle de la femme à un archaïsme hétérocentré, expose davantage à la maladie et aux risques de transmission chez ses partenaires. Le moindre symptôme génital anormal devrait suffire à aller consulter, pour détecter au plus vite la bactérie ou le virus et pour prévenir les risques de cancer, plus répandus chez les lesbiennes. Le dépistage par frottis, test VIH devrait être un réflexe annuel.
 
Les différentes actions menées – les vidéos humoristiques de la journaliste, auteur et entertaineuse Tatiana Potard, la brochure de prévention du CRIPS Île de France, le lesbian AIDS Project développé en 1992 l’association Gay Men’s Health Crisis, les actes militants d’Act Up – sont indispensables pour faire prendre conscience de ce problème et souligner l’urgence de le traiter. Mais, ce n’est pas suffisant. Le message mérite de passer, pour protéger la sexualité lesbienne et lui conférer un gage de sérieux qui, peut-être, lui donnera plus de crédibilité aux yeux d’un grand public, souvent trop enclin à… l’invisibiliser.
 
Photo Act Up * Elle est actuellement en train de préparer une étude intitulée, «Bisexualité, homosexualité : contexte préventif», à paraître sous forme de rapport dans deux ans à l’ANRS (Agence nationale de recherche sur le SIDA).