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 d’ADHEOS

Jean-Marc, 38 ans, a déposé neuf plaintes depuis un an et demi, victime d’injures antisémites et homophobes, à Bizanet (Aude). Désespéré, il ne sait plus vers qui se tourner pour que cesse son calvaire.

“Ils veulent quoi, que je me pende ?” Dans sa maison entièrement rénovée au cœur du village de Bizanet (Aude), Jean-Marc tourne et retourne le volumineux dossier qui hante son quotidien depuis un an et demi : plaintes à la gendarmerie, lettres anonymes injurieuses – “sale juif, sale pd dégage”-, photos de sa voiture inondée de tags antisémites et homophobes, certificat médical après un lynchage dans le village… Il ne manque rien. Ou plutôt si : l’interpellation des auteurs qui le prennent pour cible depuis l’été 2021.

“J’ai l’impression que tout le monde s’en fout. Je subis un traitement odieux de la part de quelques-uns et personne ne bouge !”, se désespère cet homme de 38ans, installé à Bizanet depuis plus de 6 ans, tombé à l’époque sous le charme de ce village authentique du Narbonnais, proche de la Méditerranée. Mais depuis, la jolie carte postale fait figure de véritable épouvantail pour le jeune homme qui n’attend qu’une chose, quitter le village et fuir ses agresseurs.

Tout commence le 14 juillet 2021. “Avec l’autorisation de la mairie, j’ai organisé une fête en bas de chez moi. On était une trentaine et vers 22h30, je reçois un SMS m’invitant à cesser le tapage, puis un second plus véhément. Les invités ont eu peur et tout le monde est parti”. Quelques jours plus tard, lors du vide-grenier du 1er août, Jean-Marc est pris à partie par un homme identifié comme étant l’auteur des SMS du 14-juillet. “Il m’a insulté, traité d’homosexuel, de sale juif…” Une première plainte est déposée.

Insultes, menaces de mort et de décapitation

Cet homme, que nous avons rencontré, nie ces accusations et se défend de toutes injures racistes ou homophobes. Depuis plus de six ans, il est lui-même au cœur d’un conflit avec d’autres habitants qui s’est déjà soldé par des dépôts de plaintes à la gendarmerie pour des violences et des agressions subies. Cette affaire fait toujours l’objet d’une enquête. Selon lui, l’épisode du vide-grenier était un simple accès de colère, “sans violence physique” et en lien avec les protagonistes de son propre dossier. Les vrais agresseurs de Jean-Marc profiteraient-ils du litige entre ces deux hommes pour faire passer des messages haineux auprès de ceux dont la présence est jugée indésirable ?

Les mois passent. En juin 2022, Jean-Marc exhibe sur son balcon le drapeau LGBT, pour soutenir la cause de la communauté gay à laquelle il appartient. “J’ai aussitôt reçu des lettres anonymes d’insultes et des menaces de mort, de décapitation”. En septembre, il est tabassé parce qu’identifié comme “le pd de Bizanet”. Trois jours d’ITT. “Ici, c’est l’omerta et personne ne veut soutenir ouvertement Jean-Marc par peur de représailles”, commente une des rares habitantes du village qui accepte de parler. Un village tenu par quelques familles de viticulteurs et qui a largement voté pour le Rassemblement national à la dernière présidentielle.

Le député RN, Frédéric Falcon, est fraîchement élu avec plus de 58 % des voix. Le maire du village, contacté à plusieurs reprises, n’a pas souhaité répondre à nos appels. “Il m’avait assuré de son soutien, poursuit Jean-Marc. Rien ne se passe.”

Mais Bizanet (1 700 habitants) n’est pas le XV ème arrondissement parisien où le moindre tag homophobe sur la vitrine d’un commerce aurait déclenché, à juste titre, les foudres associatives et politiques. Dernièrement, le responsable d’un fast-food a mis fin à la période d’essai de Jean-Marc pour éviter que les désagréments de son affaire ne ternissent l’image de ce géant de la restauration rapide. Aujourd’hui, Jean-Marc, accusé dans le village de se “victimiser” et d’entretenir ce climat haineux, a le soutien de la Ligue des droits de l’Homme et de la Licra. Mais à Bizanet, le silence est roi.