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 d’ADHEOS

Il faut en moyenne 14 mois pour entamer un parcours d’insémination artificielle en France, tant les demandes ont explosé depuis l’entrée en vigueur de la loi bioéthique.

Des délais d’attente très élevés en raison d’une hausse croissante des demandes : un an après son entrée en vigueur, le bilan de la « PMA pour toutes » est à améliorer, selon les associations, particulièrement les délais.

« On a eu beaucoup de chance, mais on s’y est prises très tôt », témoignent auprès de l’AFP Céline, 35 ans, et sa compagne enceinte de trois mois. « Nous nous sommes inscrites sur des listes d’attente de centres dès l’été 2021, on a eu notre premier rendez-vous en novembre et l’insémination fin juin » à l’hôpital Tenon (Paris XXe), un temps presque record tant les délais d’accès à la PMA sont élevés en France.

La PMA, ou AMP (assistance médicale à la procréation), est ouverte aux couples lesbiens et aux femmes célibataires depuis son entrée en vigueur le 29 septembre 2021. Jusque-là, elle était réservée aux couples hétérosexuels avec des problèmes de fertilité ou souhaitant éviter de transmettre une maladie grave à leur enfant.

Selon l’Agence de biomédecine, 5 126 demandes de première consultation ont été réalisées au premier trimestre 2022 par ce nouveau public. Et le nombre de consultations s’est accru de 30 % entre le dernier trimestre 2021, où l’on notait déjà une explosion des carnets de rendez-vous, et le premier trimestre 2022. Plus de la moitié des demandes émanent de femmes célibataires.

Malgré les moyens mis sur la table par le gouvernement pour réduire les délais d’attente – huit millions d’euros, plus de personnel dans les structures dédiées et une campagne de promotion des dons d’ovocytes et de sperme -, le délai d’une PMA est de 14 mois. En moyenne. Il varie d’un centre à l’autre et empêche certaines femmes de débuter un parcours en France. C’est le cas de Marie, qui a requis l’anonymat.

À 41 ans, elle rencontre une spécialiste qui lui explique qu’il y a entre un an et un an et demi de délai. Trop long, pour son couple qui souhaite « aller au plus vite ». Elles se sont finalement tournées vers l’Espagne, où Marie avait déjà réalisé une ponction d’ovocytes. Le transfert d’embryon a été réalisé en février, en trois mois seulement. Mais cela a un coût : 8 000 euros. Et Marie confie s’être sentie « isolée » durant le premier trimestre de grossesse, avec un traitement « plus lourd qu’en France » et un suivi médical insuffisant : « quelques échanges de mails… »

Des demandes « abusives » seraient faites aux femmes pour réduire l’afflux

Pour gérer l’afflux, les Cécos, Centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains, mettraient en place des mesures jugées abusives voire illégales : « Certains refusent les femmes de moins de 29 ans ou de plus de 42 ans, d’autres demandent un don d’ovocytes pour remonter dans la liste d’attente, ce qui est interdit », regrette Marion Forveille, porte-parole de l’association Mam’enSolo, qui après huit mois de patience s’est vu demander « de venir avec une personne-ressource en consultation », une mesure « abusive » selon elle. « Vous avez le temps de rencontrer quelqu’un », a-t-on dit à une adhérente de Mam’enSolo, âgée de 32 ans, pour lui refuser un rendez-vous. « Infantilisées » ou incomprises, ces femmes se sentent parfois « jugées par leur profil », insiste Marion Forveille.

Pour désengorger les Cécos, Gwenola Keromnès, cheffe de service au groupe hospitalier Diaconesses Croix Saint-Simon, à Paris, milite pour une ouverture de la PMA aux centres privés : « Nous savons faire des PMA et réaliser des congélations ovocytaires, c’est absurde de ne pas être autorisés à les pratiquer ».

Autre sujet qui mériterait de gagner en efficacité : l’information. Nicolas Faget, porte-parole de l’Association des parents gays et lesbiens, évoque de son côté un manque de communication sur les démarches administratives liées à la PMA : les femmes en couple doivent effectuer, avant l’insémination, une reconnaissance conjointe anticipée auprès d’un notaire, afin d’établir la double filiation. Or, selon Nicolas Faget, certaines femmes ignorent l’existence de cette contrainte et « doivent se lancer dans des procédures d’adoption complexes, une fois le bébé né ».