Depuis ce matin, une première liste de 10 personnalités politiques supposées homosexuelles est apparue sur le blog d’un groupe italien. Une opération qui divise la communauté LGBT
Les militants anonymes qui annonçaient depuis une semaine leur intention de dévoiler l’homosexualité d’une dizaine de parlementaires italiens (lire article) ont mis ce matin leur menace à exécution. A l’heure prévue, dix noms sont apparus sur leur blog, basé aux Etats-Unis et alimenté par des sources anonymes pour éviter les ennuis judiciaires. On y découvre l’identité de ministres et de députés du centre-droit et de droite appartenant notamment au parti de Silvio Berlusconi. «Pour le moment, nous nous limitons à publier les noms de ceux qui appartiennent à des partis ayant voté contre la loi sur l’homophobie», avaient prévenus les auteurs du blog.
«Où sont les faits?»
Depuis son annonce, l’initiative avait largement divisée les militants LGBT italiens, provoquant de nombreux débats sur le respect de la vie privée. Le président d’Arcigay, la principale association italienne de défense des droits LGBT, avait évoqué «une opération méprisable» et «un ramassis misérable de commérages». Seules quelques rares personnalités, comme la députée ouvertement lesbienne Paola Concia, avaient trouvé des circonstances atténuantes à ce type de méthodes «extrêmes», sans les approuver pour autant.
Maintenant que la liste est publiée, une nouvelle question s’immisce dans le débat: celle des preuves. Les internautes restent perplexes devant ce simple empilement de noms. «Où sont les faits?» demande Fabio dans une discussion sur Facebook. «C’est une connerie, renchérit Luca, Wikileaks ne balance pas des bruits de couloirs, mais publie des documents. Et là, oui, c’est crédible!». D’autres rappellent encore que les outings américains qui ont inspiré cette opération et fait tomber des hommes politiques aux Etats-Unis étaient étayés par des preuves confondantes. «Il n’y a aucune preuve, aucune démonstration de l’homophobie (des personnes citées), aucun dossier, aucune source vérifiable ou vérifiée» résume l’association Arcigay dans un communiqué.
Sarcasmes
De fait, les personnalités visées par cet outing à l’italienne ne se privent pas d’en rire, même si c’est peut-être jaune, en utilisant au passage deux symboles virilement rassurants: le football et les femmes. Ainsi Massimo Corsaro, député du Peuple de la liberté (le parti du Cavaliere) ironise dans le Corriere della Serra: «La nouvelle m’était venue que mon nom serait inséré dans une liste infamante, à des fins de manipulation. J’ai craint un moment d’être intégré à celle des supporters occultes de l’Inter de Milan. Tout compte fait, c’est mieux comme ça!» Même genre de sarcasme, pour Mario Baccini, du même parti: «Je suis sérieusement préoccupé car j’ai déjà reçu une centaine d’appels de femmes inquiètes, à commencer par la mienne, Diana. Elles m’ont toutes assuré qu’un comité féminin pour la protection du mâle latin était en train de se constituer…»
Sans plus d’éléments tangibles, cette campagne d’outing pourrait bien faire pschitt. Les responsables du blog poursuivront-ils malgré tout leur projet? Selon leurs dires, ils ont encore sous la main près d’une centaine de nom de personnalités gays, enfermées dans le placard.
