NEWS
Les actualités
 d’ADHEOS

A l’image d’une nouvelle manifestation jeudi soir dernier à Rouen, les anti-mariage gay continuent leur fronde, à l’heure où le texte achève sa seconde lecture à l’Assemblée nationale, et avant le vote solennel du Parlement programmé mardi prochain 23 avril. Les adeptes de la Manif pour tous illustrent la volonté de ne pas baisser les bras, sortant drapeaux, préparant les voitures pour le cortège « préfectorale », jurant leur Grand Dieu qu’eux, ils sont « pacifiques mais déterminés ».
Il est près de 19 h, ce jeudi à Rouen. Sylvie, 49 ans, est venue en mode scout question allure. « J’ai bien l’impression que le texte va être voté. Alors pour ma part, je vais continuer de manifester, y compris le 26 mai le jour de la fête des mères. Mais je pense surtout que la loi peut être bloquée au Conseil constitutionnel parce que certains articles sont obscurs. On n’y comprend rien. »
 
« Que la loi soit retirée, comme en 1984 »
 
Dans sa main, un ouvrage sur les droits de l’enfant, trouvé chez un bouquiniste de Rouen. « Ça aussi, c’est un argument : l’article sur la convention internationale des droits de l’enfant, ratifié par la France en 1989, stipule qu’un enfant a le droit d’avoir un père et une mère pour être éduqué. Il n’est pas mentionné que l’enfant peut avoir deux pères ou deux mères. » Aller jusqu’au bout pour Catherine, 48 ans, c’est agir « jusqu’à ce que la loi soit retirée et qu’on obtienne un referendum. Exactement ce qui s’est passé en 1984 avec le projet Savary refondant l’école. François Mitterrand l’a finalement retiré, alors qu’il faisait partie de ses propositions de candidat. »
Gérard Chabert, 81 ans, ancien médecin, lui emboîte le pas, veut prêter « un peu d’intelligence à l’équipe de Hollande pour comprendre la puissance de la mobilisation ». Patrice est dans la même veine. « A l’époque, il y avait un véritable président. » Mais quid alors des électeurs de François Hollande, qui ont aussi voté pour son programme ? « Qui a lu l’ensemble des propositions ? Et qui est d’accord sur l’ensemble des propositions ? », rétorque Gérard Chabert.
« Il y a donc eu des précédents, insiste Catherine. On est sur un débat de société. Mme Taubira l’a dit elle-même. Mais on ne change pas de civilisation en catimini, de façon aussi peu négociée, débattue, en passant en force au Sénat avec dans le même package l’adoption plénière qui n’était pas prévue. Quand on explique ce qui se passe, quand les instituts de sondage posent les bonnes questions : Êtes-vous pour ou contre le mariage qui implique le plein droit à l’accès à l’adoption plénière, les gens répondent à 55 % non. »
Sur la nature des jours à venir, Gérard Chabert répète qu’il est « partisan de toutes les voies légales mais totalement hostile au Printemps Français, groupuscule qui radicalise de façon déplacée le mouvement. Nous sommes un mouvement citoyen, calme. Et les propos de Mme Boutin ne sont pas raisonnables. » Au passage, le manifestant se dit déjà quelque peu rassuré. « Au cas où il y aurait un changement de majorité, la loi serait retirée en respectant bien sûr les situations qui se seront créées avec la loi qu’on nous propose. »
Patrice revient sur le Conseil constitutionnel en recours possible. « Mais d’ici là, il y aura certainement d’autres manifestations, y compris à Rouen. Là, vous remarquerez : elle est bon enfant. On l’a faite à une heure pour déranger personne ; on aurait pu la faire dans l’après-midi et bloquer Rouen avec quelques voitures ! »
Le Québec, certains Etats américains, l’Espagne, la Nouvelle Zélande adoptent le mariage pour tous. Quels regards portés ? « Auparavant, toutes les républiques en Europe étaient fascistes : le Portugal, l’Italie, l’Allemagne… Est-ce qu’il aurait fallu que la France soit fasciste ? », assène un autre Gérard. « On verra dans ces pays les dégâts que ces mariages pourront produire, affirme Patrice. On a tous un père, tous une mère. Des femmes en couple ne veulent pas entendre parler des hommes. La loi va couper les enfants de leur père. En tant qu’homme, je n’accepte pas d’être transformé en centre d’insémination artificielle. »
 
Deux députés socialistes menacés
 
Les deux députés socialistes de Vendée, Sylviane Bulteau et Hugues Fourage, ont fait l’objet de menaces des anti-mariage pour tous, a-t-on appris jeudi auprès de Sylviane Bulteau, qui a été menacée de mort par une lettre très explicite. « C’est une menace d’enlèvement et après de me faire sauter aux explosifs, donc c’est l’œuvre de quelqu’un d’assez déséquilibré mais on fait attention quand même », a expliqué hier Sylviane Bulteau. La lettre reçue, dans laquelle elle est appelée « l’otage », lui reproche « d’être de ceux qui veulent changer les bases de notre civilisation », selon une copie montrée par la députée aux journalistes à sa descente de train à la Roche-sur-Yon à la mi-journée. « Si pour diverses raisons l’otage ne pouvait être atteint », poursuit le courrier, « la personne sacrifiée sera l’une de ses proches ». « Nous sommes sûrs qu’après une ou deux disparitions, le projet de loi sera retiré », ajoute le ou les auteurs. « Par cet ultimatum nous signifions à l’otage que si la loi scélérate du mariage pour tous est votée, il paiera le prix fort ! » « On doit toujours prendre au sérieux des menaces de mort surtout quand elles sont explicitées comme elles le sont », a déclaré Sylviane Bulteau à sa descente du train, une copie de la lettre à la main. Le courrier de deux pages adressé à son nom, reçu mercredi à la permanence PS de la Roche-sur-Yon, est barré sur la première page d’un post-it sur lequel est écrit « IFO » et en dessous, « Condamnation », selon la copie de la lettre. Ce sigle « IFO » avait également été retrouvé fin mars sur une série de lettres de menaces adressées à plusieurs journalistes ainsi qu’au juge d’instruction Jean-Michel Gentil. Le député socialiste « Hugues Fourage a aussi reçu des menaces, même si ce ne sont pas des menaces de mort, lui c’est des menaces de saccager sa maison », a ajouté Sylviane Bulteau, qui a précisé qu’elle et son collègue entendaient porter plainte.
 
 
Hollande sort de sa réserve « Non aux actes homophobes »
 
Le président de la République François Hollande a dénoncé jeudi les actes « homophobes » et « violents » commis par des opposants au ma-riage homosexuel, rappelant qu’« aucune manifestation » ne devait « dégénérer », lors d’un déplacement à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle.
 
 
« Il y a des actes homophobes. Il y a des actes violents qui sont commis. Le droit de manifester est reconnu par notre Constitution et admis par les Français. Mais aucune manifestation ne doit dégénérer, aucune ne doit s’en prendre aux biens publics et il ne peut pas y avoir d’acte contre des personnes », a poursuivi le président.
« Il y a des manifestations, qu’elles se déroulent le plus pacifiquement possible, a lancé François Hollande. Qu’on n’empêche par les parlementaires de faire leur travail. Je ne peux pas accepter comme président de la République et les actes homophobes et les violences aux biens, dans le cadre des manifestations les mises en cause des forces de l’ordre. »
 
« Je ne peux pas accepter non plus qu’il puisse y avoir des parlementaires qui ne puissent pas s’exprimer dans des débats publics ou des ministres qui lorsqu’ils se déplacent » sont empêchés « de faire (leur) travail », a encore souligné le chef de l’Etat.
Selon lui, les opposants, « ce n’est pas un report qu’ils demandent mais c’est le fait que cette loi ne puisse jamais intervenir. Ça s’appelle la mise en cause d’un principe : la loi doit être respectée. »
« S’ils n’en sont toujours pas convaincus une fois l’application de la loi (effective, NDLR), eh bien il y aura d’autres élections notamment en 2017 et ces groupes politiques, ces personnalités, auront à dire ce qu’elles feront si les électeurs leur donnent la possibilité de conduire le pays. » François Hollande a réclamé que l’on « respecte le Parlement, la loi et […] le suffrage universel. Le suffrage universel a été informé de mes intentions quand je me suis présenté devant lui il y a un an sur ce texte », a-t-il rappelé. Il a demandé de « laisser le Parlement terminer son travail ». 
 
En bref
 
Valérie Pécresse (UMP) avertit
Ancien ministre UMP, Valérie Pécresse a condamné les violences de manifestants anti mariage gay, mais en accusant le gouvernement de ne rien faire pour pacifier. « Avec d’autant plus de fermeté que j’ai moi-même été victime, quand j’étais ministre, pendant neuf mois, de mouvements étudiants extrêmement violents, avec séquestration de présidents d’université, dégradations de facs. »
 
Mgr Gaillot, ancien évêque d’Evreux, réagit
« Le mariage pour tous sera un événement qui fera date dans l’histoire de notre pays et une avancée démocratique considérable, comme le fut l’abolition de la peine de mort au siècle dernier… On s’apercevra que ce mariage tant décrié ne fait perdre aucun droit aux autres, qu’il n’est en aucune manière une menace pour les familles dites « normales », ni une régression pour la société et encore moins la fin de la civilisation. »