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 d’ADHEOS

La première idée qui nous vient à l’esprit en regardant Le Refuge, le nouveau film de François Ozon (actuellement dans les salles), c’est qu’il vient réparer le ratage de son précédent long métrage, Ricky, avec son impossible histoire de bébé volant. Le réalisateur reprend peu ou prou la même thématique – la maternité et ses mystères – mais change de registre: adieu la veine socialo-fantastique de Ricky, et c’est tant mieux. D’autant plus qu’il faut se rendre à l’évidence: Ozon est plus à l’aise chez les bourgeois que chez les prolos.
 
Le Refuge débute dans la noirceur la plus totale: Mousse (Isabelle Carré), qui a échappé de peu à la mort, apprend en même temps que son compagnon, Louis (Melvil Poupaud), est décédé d’une overdose, et qu’elle est enceinte de ce dernier. Nous sommes chez les bourgeois donc, et dans la famille de Louis, on n’imagine pas une seule seconde accueillir à bras ouverts cet enfant de junkies – Ozon dépeint admirablement l’atmosphère étouffante des enterrements et ses non-dits familiaux. Or Mousse va garder cet enfant. Et cette maternité, qu’elle a quand même du mal à réaliser, va prendre un tout autre relief quand Paul (Louis-Ronan Choisy), le frère de Louis, décide de se rapprocher d’elle. Paul est gay et il est aussi en rupture avec la « famille traditionnelle » (mais nous n’en dirons pas plus).
 
UN RÉCIT PARSEMÉ DE CHAUSSE-TRAPPES
À chaque œuvre, un cinéaste travaille souvent ses mêmes obsessions, et c’est particulièrement le cas ici. Le personnage de Melvil Poupaud est comme le fantôme de celui d’un précédent film (le très émouvant Temps qui reste). Quant à la question du deuil, elle est encore une fois centrale, et les scènes de plage sont comme des réminiscences de Sous le sable. Le plus réussi dans Le Refuge, c’est la manière dont François Ozon a parsemé son récit de chausse-trappes qui relancent l’intrigue: les personnages ne sont jamais totalement comme on pensait qu’ils étaient. Plus que jamais, on sent le réalisateur taraudé par les mêmes questions: que signifie avoir un enfant quand on est gay? le fait-on pour conjurer la mort? pourquoi la maternité fascine-t-elle autant? On peut même y voir un plaidoyer pour l’homoparentalité et la gestation pour autrui… Dommage que face à une Isabelle Carré intense et bouleversante, le chanteur Louis-Ronan Choisy, qui fait ici ses débuts à l’écran, ne tienne pas vraiment la route. Il lui manque les aspérités qu’un tel rôle requérait.