À peine dévoilé, le nouveau clip d’Indochine, College Boy, suscite des interrogations: faut-il montrer autant de violence pour dénoncer la violence? La réponse est dans les images de Xavier Dolan (Laurence Anyways), qui a réalisé ce clip. Face à un élève violenté, humilié, crucifié avant d’être criblé de balles, les enseignant-e-s, les élèves mais aussi les forces de l’ordre ont les yeux bandés. Pour le réalisateur comme pour le groupe, il est temps d’ouvrir les yeux. «Dire que ça encourage la violence, c’est complètement stupide, estime Xavier Dolan dans Le Parisien. Est-ce vraiment plus violent que tous les films qui arrivent sur nos écrans tous les jours? Il n’y a pas d’ambiguïté dans le message de non-violence du clip. On est immédiatement dans l’empathie avec le personnage. [Sur les chaînes de clips], on voit tellement de scénarios racistes, violents, dégradants notamment pour les femmes. Cela me paraît absurde que ce clip soit censuré.»
RÉACTION À SEXION D’ASSAUT
Qu’y voit-on? Un adolescent cible des quolibets et des brimades de ses camarades d’école. Au début, rien de bien méchant en apparence, juste quelques boulettes de papier, et du papier toilette dans son casier. Si les images n’expliquent pas pourquoi ce jeune est la victime de ce harcèlement, les paroles de la chanson sont plus éclairantes: «J’apprends d’ici que ma vie ne sera pas facile chez les gens, je serai trop différent pour leur vie si tranquille, pour ces gens», chante Nicola Sirkis. Plus la chanson progresse, plus la violence se déchaîne. Après une balle de basket lancée au visage, l’adolescent est rué de coups pendant qu’un camarade urine sur lui dans la cour de récréation. Vient ensuite la scène de la crucifixion où les jeunes bourreaux se voient prêter main forte par la police.
«Je voulais aller jusqu’au bout non pas pour choquer, mais pour montrer que cette situation est possible parce rien ne l’empêche, explique Xavier Dolan. La question n’est pas de se demander pourquoi suis-je allé aussi loin mais qu’est-ce qui empêcherait un groupe d’adolescents d’aller aussi loin alors que le lobbying des armes aux États-Unis est très puissant. C’est ma vision nord-américaine, mais des gens se font lapider partout.»
C’est justement l’idée de cette violence à l’échelle planétaire qui a guidé Nicola Sirkis dans l’écriture de cette chanson. «J’ai lu des articles dans la presse qui m’ont révolté, confiait-il récemment à Muse & OUT. Des gamins qui se font massacrer parce qu’ils sont pédés. Des lesbiennes qui sont assassinées en Afrique du Sud, qui subissent des viols correctifs. Je l’ai fait par respect pour les gens qui ont le courage de s’assumer. Aussi, je l’ai fait en réponse aux propos homophobes qu’a tenu Sexion d’Assaut. On a le droit d’être homosexuel. Point barre. Fuck off.» Dans une interview accordée au Soir belge, il se fait plus précis sur les circonstances qui ont fait éclore ce morceau: «Cette chanson a été écrite l’année passée – avant les problèmes du mariage pour tous en France – suite aux propos d’artistes dans ma propre maison de disque, qui ont été excusés et défendus par le label [Sony est la maison de disque d’Indochine et de Sexion d’Assaut]. J’ai écrit College Boy suite à cette réaction.»
L’actualité aidant, le clip sort alors que la parole homophobe s’est décomplexée. Comme d’autres artistes ont pu le faire, Indochine a pris part au débat lors des interviews de promotion de son album Black City Parade, et a rappelé son engagement pour l’égalité des droits, en cohérence avec ses valeurs d’ouverture, qu’il prônait déjà dans sa chanson Troisième Sexe. Avec College Boy, Indochine va plus loin et frappe fort. «Ce clip est triste, beau et violent comme peut l’être la vie», décrit Nicola Sirkis.
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- SOURCE YAGG