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 d’ADHEOS

La double épreuve

 
 
La révélation. C’est le nom donné à la découverte de son homosexualité, un terme lourd synonyme de choc, de bouleversement. C’est pour les homosexuels de tous âges, confrontés à l’épreuve de se savoir différent de la norme, en proie aux doutes, aux questions, aux exclusions que l’association Adheos a ouvert le premier lieu d’accueil, d’écoute et d’orientation de la région, également bar associatif, 5 passage de l’Ancienne Caserne.

 
« Nous tenions jusque-là une réunion d’accueil mensuelle et des permanences par téléphone ou par internet. Nous avions besoin d’un lieu de rencontres en face à face et à la fois en toute confidentialité », explique Frédéric Hay, président d’Adheos (1).
 
 
Un besoin évident. « Ici, les gays et lesbiennes peuvent se rencontrer au bar associatif, sans alcool, consulter des revues et de la documentation qu’ils ne peuvent pas forcément avoir dans leur famille, échanger avec les bénévoles de notre association, formés à ce travail, par SOS Homophobie. Ils peuvent également, s’ils le souhaitent, consulter notre psychologue référente. »
Ouvert depuis fin juin avec l’aide de la municipalité qui a donné le local, soutenu par des hommes et femmes politiques de tous bords, le lieu d’accueil répond à un besoin évident d’aide et de soutien. « Les homosexuels passent par des périodes difficiles. Au moment de la découverte de leur propre différence d’abord, et ensuite. Chez les jeunes, ces difficultés se traduisent par un taux de suicide plus élevé que la moyenne des jeunes en général. Il s’agit donc d’un problème de santé publique », résume M. Hay.
Mais le lieu d’écoute reçoit « des homos de 16 à 80 ans, qui ont besoin de partager, d’échanger avec des gens qui vivent les mêmes choses qu’eux », détaille M. Hay.
L’après-midi de chaque premier mercredi du mois, Sylvie, vice-présidente de l’association et maman d’un ado homo, tient une permanence pour les parents. Cette femme dynamique, volontaire et enthousiaste (lire ci-dessous) mesure comme le dit M. Hay que « si les homos sont de mieux en mieux acceptés par la société, ils le sont toujours difficilement par la famille. »
C’est l’homophobie familiale, la plus cruelle, qui peut aller de l’indifférence blessante (« ça lui passera ») au rejet et l’exclusion du domicile. En aidant les parents, ADHEOS aide aussi leurs enfants.
(1) Association d’aide, de défense homosexuelle pour l’égalité des orientations sexuelles.
 
Sylvie, mère d’ado homo, mobilisée contre l’homophobie familiale
 
Un mercredi après-midi par moi, Sylvie, vice-présidente d’ADHEOS, tient une permanence pour les parents d’homosexuels, pour sauver l’amour familial, éviter, comme elle l’a fait avec son fils, les déchirements qui blessent tout un foyer. Voici son précieux témoignage.
« J’avais 46 ans, mon fils 14. J’avais remarqué des choses, je suis allé vers lui. Il m’a dit qu’il était attiré par les garçons et qu’il n’en parlait pas par peur de ma réaction et celle de son père. Pour nous, ça n’a rien changé. Je connaissais quelques homos mais pas spécialement le milieu gay, je crois que la nature de la réaction est une question d’ouverture d’esprit.
La révélation a été difficile pour mon fils. Il a beaucoup lu, cherché à comprendre, consulté des statistiques et m’a même demandé « pourquoi tu m’as fait homosexuel ? » Pour l’aider à répondre à ses questions, nous sommes venus l’an passé à une soirée ciné-débat d’ADHEOS. Nous y avons discuté avec des personnes présentes, qui m’ont considérée comme une mère exemplaire. « Votre fils a de la chance » m’ont dit les jeunes, qui avaient tous connu un rejet. J’ai décidé alors de m’investir dans l’association qui a par ailleurs tranformé mon fils : il a rencontré d’autres homosexuels, bien dans leur peau.
 
 «Si tous les parents…».
 
Si tous les parents étaient comme moi, il n’y aurait pas besoin d’assos et de lieux d’écoute, mais hélas l’homophobie familiale reste importante. De nombreux jeunes subissent des punitions de parents qui pensent que l’homosexualité est comme une mauvaise manie qui doit être corrigée. D’autres sont rejetés, voire exclus du domicile. De nombreux jeunes cachent leur homosexualité car ils ont peur de ne plus être soutenus matériellement par leurs parents pendant leurs études.
Mon mari et moi avons accepté l’homosexualité de notre fils sans nous dire, comme beaucoup, « il se cherche, cela va lui passer. » Ses grands-parents sont au courant, nos amis, ses copains d’enfance, qu’il a gardés, et tout se passe bien parce que sa préférence sexuelle est vécue normalement.
Comme ses parents et notre entourage est au courant, notre fils peut vivre normalement, sans se cacher, sans fréquenter des lieux marginaux ou dangereux. Il peut se promener dans la rue avec son copain sans craindre que des gens qui le connaissent nous rapportent quelque chose.
Je me suis soucié qu’il puisse vivre normalement, flirter comme les ados de son âge. Je craignais qu’il fréquente les lieux gays, que j’imaginais glauques. Mais à La Rochelle, où nous vivons, deux bars gays sont installés parmi les autres. J’étais contre les réseaux internet, finalement je l’ai autorisé, à condition de voir, avec la webcam, à qui il parle, et d’être prudent. En fait, heureusement qu’il y a internet, pour discuter, et même rencontrer des petits copains.
Les petits amis peuvent venir à la maison, ce qui n’est pas toujours réciproque. Moi, je préfère savoir mon fils à la maison plutôt que je ne sais où dehors. Quand je vois mon fils avec un copain, je ne vois pas deux garçons homos, je vois deux ados qui flirtent. S’il était avec une fille, ce serait pareil.
 
 
«Ce qui me fait peur».
 
Ce qui me fait peur, c’est le manque de prévention contre le sida. Les jeunes se protègent de moins en moins. Je mets des préservatifs à disposition de mon fils, mais je ne lui en parle pas, c’est gênant de parler à son fils de sa sexualité. Mais je demande aux copains, aux membres de l’association, de lui en parler.
 
  • Source : Sud-Ouest par Patrick Vavier