Alors que le mariage pour tous vient de mobiliser les médias, la sexualité homo n’est pas taboue à Cannes: des films comme «L’inconnu du lac» ou «La vie d’Adèle» le montrent à l’écran, avec la volonté de parler d’amour et de désir universels.
Présenté jeudi en compétition, La vie d’Adèle du Franco-Tunisien Abdellatif Kechiche, avec Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux, raconte une passion amoureuse entre deux jeunes femmes, sujet peu abordé au cinéma. Le film montre aussi le désir et le ballet des corps à travers des scènes de sexe aussi naturelles que très explicites.
Le réalisateur, qui dit avoir aussi travaillé sur «la sculpture des corps, la lumière et la beauté des visages», n’a cependant «pas eu envie de faire un film militant» et s’être «très peu interrogé sur le thème de l’homosexualité».
Des personnages qui s’aiment
«La problématique de l’homosexualité, je ne voyais pas pour quelles raisons je l’aborderais spécialement, car la meilleure façon, si je devais avoir un discours sur ce sujet, ce serait de ne pas en avoir, de filmer cela comme n’importe quelle histoire d’amour», poursuit Kechiche, qui dit avoir voulu plutôt «raconter l’histoire d’un couple, du couple. Je regardais des personnages qui s’aiment, et l’idée que c’était deux femmes m’a complètement échappé», a encore précisé le réalisateur du film, librement adapté de la bande dessinée à succès Le bleu est une couleur chaude, de Julie Maroh.
Autre film parlant de l’amour homosexuel, Ma vie avec Liberace de Steven Soderbergh montre l’acteur Michael Douglas en pianiste virtuose, 100% gay et roi du kitsch, aux côtés de Matt Damon, qui incarne son amant, s’échangeant de fougueux baisers et couchant à répétition.
Un Inconnu très cru
Mais c’est surtout un autre film très cru, L’Inconnu du lac d’Alain Guiraudie, présenté dans la sélection Un certain regard, qui a créé une petite sensation à Cannes du fait de son traitement de la sexualité gay.
Le film, qui sera interdit aux moins de 16 ans au moment de sa sortie en salles, et dont les plans de sexe non simulés ont été doublés, raconte l’histoire de Franck (Pierre Deladonchamps), un jeune homosexuel qui vient draguer au bord d’un lac et tombe amoureux de Michel (Christophe Paou), un homme beau mais dangereux, avec lequel il vit une passion.
Scènes de sexe frontales
L’inconnu du lac montre frontalement des scènes très explicites entre hommes dans les sous-bois, mais avec une alternance de séquences de sexe et d’images de la nature, et en s’inscrivant dans une histoire d’amour puissant. «Je voulais vraiment me confronter à ce qu’il est convenu d’appeler la passion, et surtout à ce que c’est que d’avoir quelqu’un dans la peau», a expliqué le cinéaste.
«On a tendance à renvoyer ce qui est de l’ordre du sexe dans la pure pornographie. Et l’amour avec la grandeur des sentiments, on a tendance à le renvoyer dans un autre cinéma», a-t-il poursuivi. «J’avais envie de mélanger les deux. Mais je ne l’ai jamais conçu dans une optique provocatrice», dit le réalisateur.
Tout est politique
Pour Franck Finance-Madureira, organisateur de la Queer Palm à Cannes – distinguant un film pour son traitement des questions homosexuelles ou de genres –, des scènes de sexe homosexuel crues comme dans les films d’Abdellatif Kechiche et Alain Guiraudie, «on les déjà vues, mais plutôt dans du cinéma queer expérimental américain Là ce qui est très nouveau, c’est qu’on est dans des films très grand public, et des films français.»
Pour lui, «quand on a l’intelligence de filmer une histoire d’amour homosexuelle de façon aussi universelle, c’est forcément un positionnement politique, parce que c’est dire: “on est tous pareils, quelle que soit notre sexualité”».
- Source TETU