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 d’ADHEOS

Les deux auteurs du tract homophobe distribué à Rouillac et Jarnac (Charente) ont tenté de s’expliquer pendant quatre heure.
 
Lorsqu’une salle d’audience se transforme en lieu d’expression cultuelle, où s’arrête la liberté de parole, où commence la provocation ? Hier, le tribunal a été confronté à une affaire qui jouait sensiblement avec la notion de liberté d’expression. Une histoire où un nom est revenu sans cesse : Dieu. Car pour Alain, 68 ans et Michel, 71 ans, membres de l’église évangéliques de Cognac, « Dieu n’est qu’amour », leurs actes ne peuvent donc pas être condamnables.
 
Ce n’était pourtant pas l’avis de l’antenne charentaise maritime d’Adhéos, association de défense des droits des homosexuels. En mai dernier, elle a décidé de porter plainte contre Alain et Michel, les auteurs à peine dissimulés d’un tract intitulé « Délivré de l’homosexualité », et distribué en 2 000 exemplaires sur la foire de Rouillac et dans les boîtes aux lettres de Jarnac.
 
« Un péché »
 
Hier, les deux copains de longue date étaient poursuivis pour provocation à la discrimination, provocation à la haine et injure publique en raison de l’orientation sexuelle. L’audience a duré plus de quatre heures. 240 minutes au cours desquelles Alain et Michel, par la voix de leur avocat, n’ont exprimé que peu de regrets. Alain, surtout, ce sexagénaire qui a « rencontré la foi » en 1967, auteur et diffuseur des tracts. Michel, lui, a seulement donné un coup de main dans la distribution. Sur ses propres deniers, Alain avait l’habitude de s’inspirer d’un site Internet évangélique, Top chrétien.
« J’ai fait pareil sur d’autres problèmes, comme l’alcool, la drogue ou la débauche. Le tract exprime une conviction. Visiblement, il y a des progrès à faire dans le chemin de la tolérance… »
 
Sous la force des questions de la procureure Stéphanie Veyssière, tenace, Alain ne désarme pas. « Avez-vous conscience d’avoir provoqué à la haine, à la discrimination ? », demande-t-elle. Silence de l’intéressé, embarrassé. « À la gendarmerie, vous avez déclaré “Pour moi, l’homosexualité est une mauvaise chose, un péché. Si j’avertis le méchant, il mourra et moi je sauverai ma vie.” » Alain reconnaît être l’auteur de ces propos.
 
Et d’ajouter : « L’homosexualité prive de la communion avec Dieu ». Alain semble à peine comprendre la portée de ses propos…
 
Michel, plus modéré, plus discret, demande « pardon aux gens blessés », reconnaît ne pas avoir eu « conscience d’avoir enfreint la loi ». Alors qu’Alain jure qu’il n’est pas homophobe.
 
« Je suis même ami avec des homosexuels. Tout ce que l’on dit, c’est de l’amour. »
 
Le pasteur de l’église évangélique de Cognac, Johan Del Zotto, cité comme témoin par la partie civile, « n’approuve pas et regrette ce trouble qu’ont connu son église et ses fidèles » après la diffusion de ce tract. Le ministère public a demandé six mois d’emprisonnement avec sursis et 2 000 euros d’amende pour les deux prévenus. L’avocat de la défense, Maître Ngafaounain, a demandé la relaxe, avant de distribuer un exemplaire de poche du « Nouveau Testament » à la procureure et à l’avocat de la partie civile, Maître Navion. Des dons sèchement refusés. Le délibéré sera rendu le 2 novembre.
 
  • SOURCE SUD OUEST
  • PHOTO  : Les membres de l’association Adhéos et leur avocat Me Navion, sur les marches du tribunal.