D’après le siège de l’entreprise, le jeune homme victime d’homophobie aurait fait de «fausses allégations». Contacté par Yagg, il affirme au contraire avoir subi des pressions le poussant à se rétracter pour pouvoir garder son poste.
Rebondissement dans l’affaire d’homophobie à Pizza Hut. Après avoir, dans un communiqué publié lundi 24 février, affirmé vouloir faire toute la lumière sur des accusations d’homophobie portées par un employé d’un point de livraison de Créteil, l’entreprise Pizza Hut a de nouveau communiqué aujourd’hui pour expliquer que le jeune homme se serait rétracté. Le jeune homme en question, Lucas* accusait sa manageuse de propos homophobes et de harcèlement. Lui et plusieurs personnes auraient par la suite subi des pressions de la part de la direction. Désormais l’entreprise fait savoir que le salarié en question revient sur ses accusations et qu’il a souhaité s’exprimer publiquement à ce sujet: «Je voudrais présenter mes excuses pour avoir fait de fausses allégations contre mon manager chez Pizza Hut. J’ai hâte de reprendre mon travail et de revoir mes collègues», aurait-il déclaré selon le communiqué de la direction.
PIZZA HUT SE VEUT EXEMPLAIRE
L’entreprise qui a, selon ses propres termes, mené une «enquête approfondie» se déclare satisfaite de cette issue: «Nous sommes heureux que l’enquête ait révélé la vérité, explique Sébastien Chapalain, directeur général de Pizza Hut Topco France. Nous sommes conscients de l’importance de l’éducation contre la discrimination et la formation continue, car elles permettent de s’assurer que ces valeurs de tolérance sont bien intégrées par tous les employés. Il n’y a de place chez Pizza Hut pour aucun type de discrimination» a-t-il réaffirmé.
L’EMPLOYÉ CONTRAINT DE REVENIR SUR SES ACCUSATIONS
Mais cette version est contestée par le jeune homme qui assure avoir subi des pressions, ainsi que plusieurs employés témoins de son harcèlement. «Lucas a bien subi des moqueries de la part de ses collègues de travail, affirme Omar* à Yagg. Lui aussi travaille au Pizza Hut de Créteil. Il considère le communiqué de la direction comme un «manque de respect envers son salarié. Cela ne fait qu’aggraver les choses.» D’après Hichem Aktouche, le délégué syndical qui s’occupe de cette affaire depuis le départ, Lucas aurait été forcé par la direction des ressources humaines à signer la déclaration diffusée aujourd’hui: «On lui a fait écrire cette déclaration en lui promettant l’abandon de la procédure de licenciement.»
DES CONSIGNES POUR CACHER L’HOMOPHOBIE
Lucas ne serait d’ailleurs pas le seul à avoir été intimé de changer sa version de l’histoire: lors de l’enquête menée par Pizza Hut, la direction aurait émis des consignes auprès des employé.e.s, afin qu’ils/elles nient toute forme de harcèlement homophobe au sein de l’équipe du point de livraison, lorsque seraient présent.e.s des représentant.e.s de Force Ouvrière. Et concernant la manageuse à l’origine des propos homophobes, la direction a été jusqu’à inciter Lucas à dire qu’il acceptait qu’elle puisse réintégrer son poste au point de livraison de Créteil. Elle avait été mutée suite aux accusations de l’employé.
LUCAS VOULAIT SEULEMENT «RETROUVER SON TRAVAIL»
«Lucas est perdu et en état de choc, il ne sait pas quoi faire, témoigne un proche. D’abord victime, il est maintenant présenté comme un menteur à cause de cette déclaration. Il ne se retrouve pas dans les propos cités par Pizza Hut, il ne souhaite pas présenter des excuses et affirme toujours que ce qu’il a subi est vrai. La seule chose qu’il voulait, c’était retrouver son travail.» Hichem Atkouche analyse la réaction du siège: «Leur méthode, c’est de toujours prendre la défense du manager», explique-t-il. Pour lui, la direction de Pizza Hut n’aurait pas du attendre aussi longtemps pour intervenir. «Il a fallu que les médias s’emparent de l’affaire pour qu’elle se penche sur le problème.» Lucas envisage de porter plainte pour discrimination en raison de l’orientation sexuelle réelle ou supposée, injure à caractère sexuel et chantage.
- Source YAGG