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 d’ADHEOS

Omar a fui Dakar pour Bruxelles en raison de son homosexualité et par crainte de représailles. Nous l’avons rencontré…
 
«Je ne savais pas ce que c’était les droits de l’homme. Sinon, je serais venu plus tôt en Belgique.» C’est dans un petit café proche de la porte Louise que nous rencontrons Omar. Autour d’un chocolat chaud, il murmure l’histoire qui l’a amené jusqu’à Bruxelles.
 
Le jeune homme s’excuse: «Merci de parler assez fort car je n’entends pas bien.» Il y a cinq ans, Omar est arrivé à Bruxelles en provenance de Dakar. En raison de son homosexualité, il a préféré la clandestinité à Bruxelles plutôt que la peur quotidienne à Dakar. «Parce que j’étais homosexuel, mon père m’a maltraité. Vers mes 18 ans, il me versait de l’huile chaude dans les oreilles. Mon papa est très religieux. Au Sénégal, même si tu as 30 ans, ton père peut encore te gifler.»
 
Omar était danseur dans une troupe. Une tournée européenne l’a mené jusqu’à Bruxelles: un aller sans retour. «J’avais appris que mon petit copain avait été attrapé par la police. Ma famille m’avait envoyé des lettres pour me dire de ne plus revenir. Je me suis alors dit: “ je ne retourne pas ”.»
 
Invoquer son identité sexuelle et les menaces qui pèsent sur lui seront-elles suffisantes pour lui permettre de rester? C’est loin d’être une évidence. «Je suis réfugié et j’ai besoin des ONG. J’ai déjà passé une première interview mais j’étais trop énervé et j’ai pleuré pendant 2h30.» Aujourd’hui, il sait que son avenir en Belgique tient à peu de chose: «On peut me rembarquer. C’est comme si j’étais assis sur un siège avec un seul pied.»
 
Son quotidien à Bruxelles est pourtant peu enviable. Il loge dans des conditions difficiles, vit de petits boulots… «À Bruxelles, c’est diamétralement opposé à ce que je vivais au Sénégal. Les gens sont ouverts et aimables. Même si tu es homo ou Africain, dès qu’ils te voient, ils t’estiment.»
 
Il n’a plus jamais eu de contacts avec sa famille, ni avec son pays. «Ma famille a eu le cœur de m’abandonner; alors moi aussi! Le pays ne me manque pas, c’est comme si je l’avais quitté hier. Si j’y retourne, la sentence, ce sera la prison. Si la police t’attrape, on peut te tuer sur place. J’étais comme un étranger dans mon pays.»
 
Réfugié «sexuel»?
 
L’identité sexuelle des réfugiés et les conditions dans lesquelles ils sont réprimés dans leur pays peuvent entrer en compte pour la régularisation d’un dossier.
 
À Dakar, nous y avons rencontré Djamil. Le jeune homme a mis en place une association baptisée «Patience». Tous les homosexuels qui ont sollicité à un moment donné son aide sont repris dans un carnet. «J’ai déjà eu des contacts avec la Belgique: avec des avocats ou des jeunes qui étaient partis. On me demande de confirmer leur identité. Oui, il y a des Sénégalais qui sont sur la route en raison de leur orientation sexuelle. Ils abandonnent tout pour sauver leur peau.»
 
Rencontré au forum social à Dakar, Kemal Kebe est proche des médias sénégalais. L’association PANOS pour laquelle il travaille offre des formations aux journalistes pour aiguiser leur sens critique. «L’homosexualité? Les journalistes ne sont pas prêts à en parler.» Les médias locaux prennent souvent peu de recul et jugent durement les cas d’homosexualité.
 
Mais il faut aussi se méfier de ce qui circule sur le net. Sachant que l’identité sexuelle d’un migrant peut l’aider pour obtenir un statut de réfugié, certains en jouent abusivement pour le faire-valoir dans leur dossier. «Sur certains sites en ligne, tu les payes et ils publient comme quoi tu es gay. Le forum est ouvert et la personne se fait insulter.» Et copieusement… Une fois l’article et les insultes imprimés, ils sont joints au dossier du candidat réfugié qui n’a peut-être rien d’un homosexuel.