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 d’ADHEOS

Attirés par de fausses petites annonces, les jeunes sont harcelés et violentés, et des photos et vidéos de ces agressions sont partagées sur les réseaux sociaux, en toute impunité.
 
Selon Spectrum Human Rights Alliance, qui combat les discriminations et violences fondées sur l’orientation sexuelle en Europe de l’Est, et en particulier en Russie, en Ukraine, en Biélorussie, des groupes extrémistes utiliseraient les réseaux sociaux pour piéger de jeunes LGBT et les torturer.
 
DES VIDÉOS COMME TROPHÉES
Un réseau social en particulier, Vkontakte.ru, est dans le collimateur de l’organisation, accusé de tolérer les groupes créés pour attirer les jeunes LGBT par de fausses petites annonces. À l’origine de cette campagne de harcèlement et de violences, l’ultranationaliste Maxim Martsinkevich, ancien leader du groupement néo-fasciste Format 18 (1 pour A, 8 pour H, les initiales d’Hitler), condamné à trois ans de prison pour incitation à la haine ethnique et libéré en décembre 2010. Sous prétexte de lutter contre la pédophilie et la gérontophilie, ses troupes s’en prennent aux jeunes gays, les forcent à dévoiler leur identité, les outent auprès de leurs parents, peut-on lire sur le site de Spectrum Human Rights Alliance, qui publie également la photo ci-dessus.
 
Format 18 était connu pour ses vidéos incitant à la haine contre les sans abri, les travailleurs immigrés asiatiques et les antifascistes, selon un article publié il y a quelques jours par le KyivPost ukrainien, à l’approche d’un «séminaire» organisé à Kiev par Maxim Matsinkevich. L’utilisation de vidéos partagées sur internet est toujours au programme pour l’homme et ses partisan.e.s. Ainsi, la vidéo mise en ligne par Larry Poltavsev, fondateur de Spectrum Human Rights Alliance, émigré russe aux États-Unis, comme exemple des exactions des extrémistes.
 
La vidéo d’une vingtaine de minutes, qui circulait énormément depuis deux jours mais semble avoir été tournée il y a quelques mois, a été retirée par YouTube, en raison de ses règles «interdisant l’usage de contenu visant à harceler, à agresser ou à menacer une personne», et ce malgré les appels en commentaires à ne pas signaler la vidéo, puisqu’elle avait pour objet d’attirer l’attention sur les actions des groupes extrémistes.
 
Dès les premières secondes, même sans parler russe, on sent le désarroi du garçon. Selon un commentateur sur le blog américain Joe. My. God, le garçon a 15 ans. Il a répondu à une annonce d’un homme appelé «Oncle Dima» qui lui a promis de le payer pour une relation sexuelle. Les adolescent.e.s, qui ont créé le faux profil pousse le garçon à admettre qu’il est venu pour «baiser» cet homme, à faire coucou à ses parents et lui demandent ce qu’il compte faire de l’argent (s’acheter un ordinateur). Il est aussi obligé de donner son nom complet et de le répéter plusieurs fois, ainsi que son adresse et le nom de son école. Interrogé sur son orientation sexuelle (est-il «pédéraste», gay ou «petukh», terme employé en prison pour désigner les détenus qui ne sont bons qu’à être des partenaires sexuels passifs pour les autres), il répond qu’il est bi. Une femme intervient vers la 13e minute, non pour aider le garçon mais pour renchérir.
 
À la fin de la vidéo, les adolescents arrosent leur victime d’urine, qualifiée d’«eau bénite».
 
«Selon nos informations, le garçon est très traumatisé, mais vivant», rapporte Larry Poltavsev en commentaire de la vidéo, qui indique également que des sous-titres en anglais devraient être ajoutés prochainement.
 
EN TOUTE IMPUNITÉ
Ces «interrogatoires» ont lieu dans toute la Russie. Une autre vidéo, qui montrait un homme de 21 ans harcelé par trois membres du groupe Occupy Kamensky, armés d’une hache et d’une pelle, dans un cimetière, a été supprimée après que le site Lenta.ru a débuté une enquête sur le sujet. Le journaliste y évoque notamment Alex Buligin, 19 ans, qui se serait suicidé après avoir été «interrogé», forcé à boire de l’urine et à admettre qu’il était bisexuel (mais n’avait jamais eu de relations sexuelles), dans la région de Kamensk-Ouralski, à une centaine de kilomètres de Iekaterinbourg.
 
Le 1er juillet, lors d’un rassemblement en faveur de la loi interdisant la «propagande des relations sexuelles non traditionnelles» non loin de là, une banderole proclamait que 50% des gays sont pédophiles, sous le dessin d’un cercueil. Une vidéo du rassemblement était titrée «Enterrement de Buligin». Pourtant, selon Lenta.ru, Alex Buligin est en vie. Le jeune homme a refusé de répondre au journaliste, la vidéo de son interrogatoire lui a valu un certain acharnement dans la ville où il vit, explique une de ses amies. Mais quelques personnes l’ont entouré et soutenu.
 
Selon le militant Valentin Degterev, cité par LGBTQ Nation (et mentionné dans l’article de Lenta.ru), la police refuse d’intervenir, malgré les plaintes déposées par les victimes, leurs familles ou les militant.e.s LGBT. Joint par Yagg, Nikolai Alekseev, président de l’association GayRussia.ru, s’est montré désabusé par la situation, «déjà connue depuis un certain temps». «C’est honteux mais personne ne s’y intéresse», a-t-il regretté. Avant d’ajouter: «La Russie devient folle.»
 
«Bien que la Guerre froide soit terminée, les violations des droits humains abondent en Russie, avec le feu vert du gouvernement, déplore Larry Poltavsev dans une tribune publiée hier sur le site du Washington Blade. Mais contrairement à ses prédécesseurs, Vladimir Poutine est traité avec de grands égards par l’Ouest et nos médias. Nous ne pouvons pas le laisser s’en sortir impunément. Il est vital de mettre la Russie face à ses responsabilités.»