Un Brésilien aurait-il été victime d’acte homophobe et raciste au camp naturiste du Cap d’Agde Ce chef d’entreprise de couleur, retrouvé nu sur la voie publique aurait été agressé par des agents de sécurité. Marcos souffre d’une double fracture de la jambe droite. La ville dément
Mais que s’est-il passé ce samedi 27 mai 2023 au village naturiste au Cap d’Agde dans l’Hérault ? Marcos, 54 ans, chef d’entreprise, a été retrouvé peu après 17h, nu à la sortie du village de renommée internationale. Son pied droit était désaxé. Une double fracture ouverte du tibia et du péroné.
Le chirurgien qui l’a opéré à la polyclinique Saint-Privat de Boujan-sur-Libron, dans l’agglomération de Béziers, a prononcé 60 jours d’ITT temporaires. Marcos ne pourra pas marcher avant six mois et devrait garder de lourdes séquelles.
Cet homosexuel d’origine brézilienne accuse le service sécurité de l’avoir agressé alors qu’il allait aux WC. D****eux agents lui auraient sauté dessus car il n’avait pas ses papiers sur lui en l’insultant, d’après ses dires, de “négro” et de “sale pédé”.
Marcos, qui est suivi pour des problèmes cardiaques, venait de s’installer peu après 17h sur la plage avec son compagnon, Michael. Ils vivent ensemble et sont pacsés depuis neuf ans. Le couple, qui possède une carte d’abonné, explique à France Bleu Hérault avoir franchi en toute légalité la barrière de sécurité sans aucune difficulté et avoir garé leur voiture sur un parking situé dans l’enceinte du village naturiste. “Mes papiers étaient dans la voiture. Les agents n’ont rien voulu savoir. Ils m’ont dit qu’ils avaient autre chose à foutre. J’étais à poil. Je n’avais que mon téléphone portable avec moi. Je leur ai dit que ma carte d’abonnement était dans ma voiture.
“Il était au sol. Son pied ressemblait à un club de golf”
Mickael, son compagnon de vie, a retrouvé Marcos à devant l’entrée du camp naturiste du Cap d’Agde. Il se dit scandalisé. “Il était au sol. Son pied ressemblait à un club de golf.
Une plainte contre X pour violences volontaires a été déposée fin mai au parquet de Béziers par son avocat, Marc Montagnier du barreau de Versailles. “Si la plainte n’était pas retenue par le parquet, nous saisirons le juge d’instruction comme nous l’autorise le code de procédure pénale. L’affaire a été prise à la légère. Je me refuse à croire que les policiers aient eu des accointances avec les agresseurs présumés. Simplement les policiers nationaux et municipaux n’ont pas saisi la gravité des blessures”. La défense parle de non-assistance à personne en danger.
Une enquête est ouverte
Raphael Balland, le procureur de la République de Béziers, nous confirme avoir transmis cette plainte au magistrat en charge du contentieux des violences et saisi le commissariat de police d’Agde aux fins de diligenter les investigations concernant ces faits susceptibles d’être qualifiés, à les supposer avérés, de violences volontaires, soit contraventionnelles, soit délictuelles (en cas de circonstances aggravantes, par exemple si ces violences ont été commises en réunion ou en raison de l’orientation sexuelle ou de l’appartenance supposée à une prétendue race de la victime).
La ville d’Agde soutient son service de sécurité et dément les accusations portées
Gilles d’Ettore, le maire d’Agde, dément les accusations portées. “Ce dernier est entré illégalement dans le village naturiste en passant par la baie des cochons. Les agents de sécurité ont alors accompagné ce baigneur à l’extérieur. Il était menaçant dans ses propos. Il n’a pas été agressé comme il le dit. Cette blessure n’a pas été faite à l’intérieur du village“, assure l’élu à France Bleu Hérault. Gilles d’Ettore apporte son soutien au service de sécurité qui dépend de la ville et assure que les images des caméras de vidéo surveillance dans et à l’extérieur du site devraient le confirmer.
Un abonnement en bonne et due forme
La victime supposée avait bien, comme elle le confirme, sa carte d’abonné annuel comme France Bleu a pu le vérifier. Un abonnement à son nom, honoré et valable du 31 mars 2023 au 21 mars 2024. Pour préserver son anonymat, nous avons fait le choix de dissimuler son identité.
“Vous m’avez pété le pied”, “et bien tant mieux” répond un vigile
Lors de son agression, la victime appelé son compagnon avec son téléphone portable, mais tombe sur son répondeur. Ses échanges avec ses agresseurs présumés ont en partie été enregistrés. Sept minutes d’enregistrement que nous nous sommes procurés. Les échanges s’ils sont confirmés sont saisissants ”Au secours, appelez la police. Je suis en train de me faire agresser. Je veux aller au commissariat. Ma voiture est là. Vous m’avez pété le pied. Et bien tant mieux. je n’ai rien fait, je voulais juste aller aux toilettes. Laissez moi respirer. Vous allez me foutre dehors, mais je suis à poil. Je n’arrive pas à marcher. je vous jure”
Faute de pouvoir être acheminé par les secours pour se faire soigner, Marcos a été transporté par son compagnon aux urgence de la clinique Privat, à Boujan-Libron. Il est aujourd’hui rentré chez lui après une semaine d’hospitalisation. Marcos, encore traumatisé par son calvaire, est suivi psychologiquement. Il ne pourra plus marcher avant de longs mois d’après son médecin.
Le commissariat d’Agde explique de son côté avoir été alerté par le 17 d’une altercation au centre naturiste, d’avoir ensuite envoyé sur place une patrouille. La cheville de la victime était en effet de travers. Le service de sécurité aurait alors expliqué que Marcos était rentré illégalement sur le site. Les secours n’étant pas disponible, les fonctionnaires de police ont alors conseillé au compagnon de la victime, de la transporter pour se faire soigner.
Le couple lance un appel à témoins et incite tous ceux qui ont pu assister à cette agression à se manifester auprès du parquet de Béziers ou de leur avocat dont les coordonnées sont sur internet.
Interview de Marcos et Mickaël
Comment cette agression, dont vous parlez, s’est déroulée ?
L’agent de sécurité n’a rien voulu savoir lorsque je lui ai dit que je n’avais pas mes papiers sur moi. Il n’a pas voulu m’accompagner. Je viens faire ici du naturisme depuis plusieurs années. Tout le monde ne se déplace pas avec la clé de sa voiture sur soi. Ni sa carte d’abonnement. On était passé légalement à la sécurité à l’entrée. Il pouvait simplement vérifier en passant un coup de fil.
Malgré cela, vous allez aux toilettes. Que se passe-t-il ensuite ?
À la sortie des WC, cet agent m’a attrapé le bras. Il m’a ordonné de quitter le village. J’ai refusé. Il a alors appelé un deuxième agent qui avait une bonne carrure de rugbyman. Il m’a attrapé le bras, puis m’a donné un violent coup à la poitrine, avant de m’attraper par le coup en me jetant au sol.
“J’avais du mal à respirer” – Marcos
Le rugbyman appuie alors fortement son genou sur ma poitrine. J’avais vraiment des difficultés à respirer. J’ai ensuite ressenti une douleur immense à la cheville. Un agent venait de me sauter sur le pied droit.
Aucun témoin n’est intervenu ?
J’étais plaqué à terre. Je criais au secours, au secours. Les témoins ont été écartés. Ensuite ils m’ont jeté dans une voiturette électrique. La sécurité avait été renforcée pour m’expulser. J’ai essayé d’ameuter les touristes. On me disait “ta gueule, ta gueule sale nègre”. l’un d’entre eux était menaçant avec son poing. J’avais peur qu’il me tape.
Et après vous dites, ils vous jettent à l’extérieur du camp, sur la voie publique. Mais vous êtes encore nu ?
Oui. J’étais à poil devant le village naturiste au beau milieu des passants et des touristes. J’ai honte. Je me sens sale. J’étais nu devant tout ce monde habillé, qui me regardait comme si j’étais un réfugié, un voyou. J’étais tout seul. J’ai essayé de cacher mes parties intimes du regard des passants. J’ai été humilié, brutalisé. Tout le monde me regardait j’ai vraiment honte. Michael, mon compagnon, ne savait pas où j’étais puisque j’étais parti aux WC. J’ai essayé de l’appeler mais je n’arrivais pas à l’avoir.
Marcos n’hésite pas à parler de non-assistance à personne en danger. Il pointe du doigt la police nationale et municipale qui se trouvaient à l’extérieur : “Ils ont sous-estimé mes blessures et la gravité de cette agression. Ma cheville était gonflée, pliée comme un club de golf vers l’intérieur de mon corps. Une atroce souffrance. Tout était broyé à l’intérieur de ma cheville comme si j’avais eu une violente chute de ski. Ils ne sont pas intervenus. Je ne peux pas m’avoir blessé de la sorte comme ils le disent sur un trottoir. Ce n’est pas possible. A la clinique, le médecin urgentiste n’en revenait pas. Il m’a dit, ils ne vous ont pas loupé. Ca voulait dire ce que ça voulait dire. En arrivant les policiers se sont tous fait la bise avec la sécurité. J’étais pourtant nu sur la chaussée. Je me suis senti délaissé par la police municipale et nationale. Je suis désolé de dire cela mais il y a non-assistance à personne en danger. J’ai dû faire toutes les démarches seul .Nous avons dû appeler les secours.
Votre compagnon parle d’un acte raciste et homophobe. Qu’en pensez-vous ?
Ils ont fait des allusions à mon profil. Ils m’ont dit que je n’avais pas la tête de la clientèle de ces lieux. Ils m’ont insulté à plusieurs reprises de sale négro et de pédé.
La mairie d’Agde dit que vous étiez menaçant et sans papier ?
Je n’ai eu aucun geste déplacé qui peut justifier une telle agression. Si j’avais eu un couteau comme l’avance la sécurité, pourquoi alors la police nationale ne m’a pas interpellé. Il aurait dû y avoir une alerte, une procédure, l’arme aurait été confisqué. Il n’y a rien de tout ceci. Cela n’a pas de sens. C’est une manière pour eux de se défendre, de se couvrir pour se protéger.
Mickael, vous étiez bien sur place ? Comment réagissez vous ?
Je suis stupéfait d’une telle violence. Je me suis inquiété de ne pas le voir revenir. Je vis avec Marcos depuis 9 ans. Il n’est pas agressif. Mais admettons, Qu’est-ce qui pourrait justifier une telle agressivité. Quand je suis arrivé à la sortie, son pied vous imaginez, son pied était désaxé. Quand je suis arrivé, je l’ai retrouvé au sol à l’entrée.
Vous dites que cet incident n’est peu être pas unique ?
J’ai entendu dire à policier national à un des agents maintenant ça suffit. La prochaine fois qu’il y a un problème comme celui-là vous nous appelez. Je suis persuadé que c’est quelque chose qui doit arriver plus souvent que ce que l’on pense. Ce qui me blesse c’est qu’on ne l’a pas cru. On l’a touché, mis au sol, transporté dans un véhicule, jeté nu sur la place publique comme si c’était un déchet c’est dégradant. Notre voiture était stationnée à 100 m de la guérite.
Avez-vous prouvé que vous aviez votre abonnement ?
J’ai montré ensuite la carte d’accès au policier à l’accueil. Ces gens-là devraient nous connaître. Nous venons très souvent l’hiver et l’automne. Un peu moins souvent l’été. En arrivant aux urgences le médecin urgentiste de la clinique m’a parlé d’acte de barbarie C’est trop violent.
“Il aurait pu le tuer : Marcos est cardiaque”
“J’ai senti dans ce groupe de vigile quelque chose de sadique, confie encore Mickaël. Vous imaginez, jusqu’à lui péter la jambe, à le jeter sur une route nu c’est de l’humiliation c’est un crime contre l’humanité”.
SOURCE : francebleu.fr