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 d’ADHEOS

La députée du parti centriste, Khwala Ben Aïcha, devrait déposer, début novembre 2018, une proposition de loi visant à interdire la pratique du test anal par les forces de l’ordre en Tunisie pour « prouver l’homosexualité ».
 
 
Agir, et agir vite. C’est en tout cas la volonté de la député Khwala Ben Aïcha et des associations de défense des droits LGBT+ en Tunisie. Car la situation est grave. L’article 230 du code pénal tunisien condamne la sodomie à trois ans d’emprisonnement. Pire encore, les forces de l’ordre ont recours, régulièrement, à l’utilisation de test anaux pour « prouver l’homosexualité » du prévenu. La jeune députée, âgée de 30 ans et siégeant depuis 2014 dans l’hémicycle, veut interdire cette pratique barbare.
 
Un acte de barbarie
 
En août dernier, TÊTU avait interviewé un tunisien, Karim B., incarcéré pendant un an dans la plus grande prison de Tunis, pour « délit d’homosexualité ». Il a subi un test anal, qu’il décrivait ainsi : « Le médecin m’a demandé de me déshabiller, de m’accroupir et d’écarter les jambes. Il a enfilé un gant et m’a mis un doigt dans l’anus. C’est cet acte considéré comme étant un acte de médecine, qui est censé prouver la sodomie. »
 
Contacté par TÊTU, Mounir Baatour, le président de l’association de défense des droits LGBT+ Shams, qualifie ce test de torture :
 
« Le test anal est une torture physique et psychologique déclarée comme telle par l’Organisation mondiale contre la torture, qui a d’ailleurs condamné la Tunisie en 2017 pour son utilisation. »
 
Toujours selon cet activiste, le résultat du test est souvent utilisé par les juges comme une preuve irréfutable d’homosexualité. Son interdiction permettrait donc de réduire le nombre de condamnations pour « délit d’homosexualité ».
 
« Rompre avec l’hypocrisie sociale »
 
Selon l’association Shams, à ce jour, 53 tests anaux ont été pratiqués depuis le mois de janvier. On en dénombre 79 pour l’année 2017. Pour la député centriste Khwala Ben Aïcha, à l’origine du texte de loi, il y a urgence à agir.
 
« Cet article 230 du code pénal tunisien est une pure violation des droits humains les plus fondamentaux. En criminalisant l’homosexualité, on permet l’utilisation de tests qui vont à l’encontre du droit à l’intégrité physique. »
 
La députée compte déposer le texte à l’Assemblée nationale tunisienne dans la première quinzaine du mois de novembre prochain. Elle a récolté 16 promesses de signatures émanants de différents groupes parlementaires. « Le but est d’avoir au moins un signataire dans chaque groupe parlementaire, pour que chacun puisse influencer les membres de son groupe, cela augmentera les chances pour que la loi passe », confie-t-elle à TÊTU.
 
Pour cette parlementaire, la nouvelle génération de députés se doit de poser le débat sur la table. Le sujet doit infuser toute la société : « Il y a un véritable tabou autour de l’homosexualité. On se permet de juger autrui, mais dès qu’on aborde le sujet, tout le monde se tait. » Et de poursuivre :
 
« Je veux défendre les acquis de la nouvelle constitution, je veux rompre avec cette hypocrisie sociale. Il s’agit de défendre cette minorité qui existe en Tunisie et qui a le droit de vivre comme tout le monde, sans être atteinte dans ses droits fondamentaux. »
 
Une autre proposition de loi devrait être déposée dans le même temps, constituée, elle, d’un article unique exigeant l’abrogation de l’article 230 du code pénal tunisien. En 2017, la Tunisie avait pourtant déjà assuré, au Conseil national des droits de l’homme des Nations Unies, vouloir interdire la pratique de ces tests.