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 d’ADHEOS

Djamil Bangoura, le responsable de l’ONG sénégalaise LGBTI, Prudence + fondée en 2003 a été passé à tabac le 10 Février dernier à Pikine. Cette nouvelle attaque dont il a été l’objet a cette fois nécessité une intervention chirurgicale d’urgence. Rétabli peu à peu de ses blessures, il livre à 76crimes le récit de son agression, encore sous le choc.

1. Peux-tu nous relater les circonstances de ton agression ?
 
« Le 10 Février dernier, je circulais à bord d’un autobus en fin d’après-midi, entre 16H00 et 17H00, sur le secteur situé entre Keur Massar et Malika-village, en périphérie de Dakar, afin de pouvoir regagner mon domicile. Alors que le bus avait fait une halte, un groupe d’individus de trois personnes sont montés à bord, avec l’intention d’en découdre fermement avec moi. Très vite les insultes homophobes ont fusé à mon endroit et j’ai eu droit à tous les noms d’oiseaux, puis ensuite, cela n’a été qu’un déchaînement de coups, même si j’ai essayé de me défendre de mon côté. J’ai été frappé à coups de bâton après que l’un de mes agresseurs s’est écrié, « c’est lui le plus grand des goordjiguen (terme servant à désigner les gays au Sénégal et qui peut avoir une connotation très péjorative – littéralement cela signifie homme-femme). Au cours de cette rixe, les femmes à proximité criaient, tandis qu’un homme assez âgé a tenté de s’interposer sans succès. J’ai essayé de résister et de rendre coups pour coups, mais à trois contre un, ils étaient bien plus nombreux que moi. Finalement, c’est un violent coup de pied reçu au ventre, au niveau du sternum qui m’a fait quasiment perdre connaissance. Toutefois, même au sol, j’ai souvenir que les coups continuaient à pleuvoir, mais je ne pouvais plus rien faire ».
 
2. Quelles ont été les conséquences de cette attaque ?
 
« Elles ont été médicales principalement, car à présent je rechigne à me rendre au commissariat, lorsque je me fais agressé. Une ambulance du samu est arrivée sur les lieux, une fois les assaillants repartis. J’ai eu droit à quelques soins liées à des lésions et à des abrasions superficielles de la peau. Néanmoins, le lendemain, mes douleurs au niveau de la zone ventrale étaient intenses et elles ont nécessité de me mettre en observation à l’hôpital militaire de Ouakam. C’est suite à une radio qu’il a été décidé de me faire opérer en urgence. Consécutivement à l’intervention chirurgicale, il a été décidé de me maintenir sous surveillance médicale durant 2 jours au total ».
 
3. Est-ce que tu souhaites apporter un suivi judiciaire en déposant plainte?
 
« Les faits sont survenus à 500 mètres à peine d’un commissariat en sous-effectif en fin d’après-midi et bien que je reconnusse un de mes assaillants, je ne le souhaite pas. Ce dernier traîne souvent dans le quartier où je réside et il m’insulte presque quotidiennement quand il m’aperçoit. D’ailleurs, il est probablement à l’origine de la filature qui a mené au guet-apens dont j’ai fait l’objet. Il connaît peut-être mes habitudes. En tout état de cause, il est sûr que je n’ai pas été ciblé par hasard et ce n’est pas la première fois non plus que l’on s’en prend à moi physiquement. Depuis 2006/2007, j’ai été attaqué pas mois de sept fois et à ce jour, aucune de mes plaintes n’a pas abouti. Je me remémore encore aujoud’hui le traumatisme de ma première agression, lorsque des jeunes de mon voisinage sont venus déversés des bidons d’essence pour mettre le feu à mon ancien domicile. A l’époque, le chef du quartier et l’imam qui avaient été les commanditaires de cette tentative d’assassinat n’avaient même pas été inquiétés par les autorités ».
 
4. Comment vois-tu ton avenir ?
 
« Pour l’instant j’ai besoin de repos pour achever ma convalescence. Et pour cela, il me faudra un peu m’éloigner des lieux où j’ai mes habitudes, afin que je ne tombe pas nez à nez la même bande que celle qui m’a valu mon hospitalisation ».