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 d’ADHEOS

La France compte 3,2 millions d’homosexuels et de bisexuels, soit 6,5% de la population. Comment votent-ils? Et qu’en disent les candidats à la présidentielle? Enquête sur une minorité qui compte.
 
«Pourquoi pas l’autorisation de la polygamie!», déclarait récemment Marine Le Pen parlant du mariage gay sur France Inter.
La candidate estimait dans l’interview que parmi les règles de notre société, «le mariage s’effectue entre un homme et une femme». De quoi faire partir en courant n’importe quel homo? Pas si sûr. Didier Lestrade, co-fondateur d’Act Up Paris, créateur de «Têtu», soutient que la société française vire à droite et que les gays ne font pas exception. «La pensée de droite a toujours existé chez les homos. Ce qui change, c’est qu’ils s’expriment désormais ouvertement», affirme-t-il. Dans un livre contesté, «Pourquoi les gays sont passés à droite», il affirme que même si de nombreux homosexuels votent à gauche, surtout depuis que François Hollande se prononce en faveur de l’adoption et du mariage, «les problèmes que peut poser l’islam ont délié les langues.» Et ce d’autant plus que pour se montrer crédible, l’extrême-droite européenne incorpore les minorités. Elle s’est ainsi récemment émue du sort des homosexuels qui vivent dans des quartiers à forte présence maghrébine, et qui seraient «victimes de lois religieuses qui se substituent aux lois de la République».
 
Pour Didier Lestrade, «Marine Le Pen est très maligne. Au lieu de rappeler le discours de papa, elle fait progresser son discours, elle trouve de nouvelles stratégies». Une stratégie qui ne plaît pas du tout à Elizabeth Ronzier, présidente de SOS Homophobie: «Jouer sur les droits des gays pour taper sur les immigrants, ça ne fait pas partie de nos valeurs.» C’est aussi l’avis de Frédéric Martel, un écrivain et journaliste auteur de «J’aime pas le Sarkozysme culturel»: «Que l’islam radical soit hostile aux gays, c’est un fait difficilement contestable. Mais la situation ne se résume pas à un conflit entre gays et musulmans.»
 
Régressions et stratégies
 
Reste que les droits de la communauté LGBT semblent un thème de campagne important, au point que tous les candidats se prononcent à ce sujet. Tous les candidats, dont Nicolas Sarkozy, qui a déclaré au «Figaro Magazine» en février: «Je ne suis pas favorable au mariage homosexuel. Il ouvrirait la porte à l’adoption.»
Ses propos ont fait scandale au sein de Gaylib, le groupe LGBT rattaché à l’UMP, qui a décidé de retirer son soutien au président-candidat. Le président de Gaylib Emmanuel Blanc a d’ailleurs fait remarquer que ces déclarations indiquent un recul certain par rapport à 2007. Nicolas Sakozy parlait de la valeur de l’amour homosexuel. «Il avait proposé un contrat d’union civile, une sorte de pacs amélioré, mais là il n’y a rien», rappelle Emmanuel Blanc.
 
Il y a ceux qui régressent, ceux qui construisent des stratégies… et ceux qui tentent de tirer leur épingle du jeu. Parmi les candidats les plus ouverts, on peut ainsi compter François Bayrou, du Mouvement Démocrate, sur le site internet duquel on peut lire la phrase suivante: «Le fait que deux personnes élevant des enfants ensemble, les ayant adoptés ensemble, soient reconnues toutes les deux comme parents est un droit logique et de bon sens.» Mais s’il approuve l’homoparentalité, il se montre plus réticent vis-à-vis de l’idée du mariage des homosexuels. Dans une interview accordée en février à Europe1, il se déclarait en faveur d’une «égalité des droits et des devoirs et de la forme», mais souhaitait que cela s’appelle une «union» et non pas un «mariage»: «Il y a des traditions qui viennent de loin», justifiait-il.
 
En définitive, il se pourrait bien qu’auprès de la communauté LGBT, ce soit François Hollande, candidat socialiste, qui s’en sorte le mieux, lui qui s’est clairement prononcé en faveur du mariage et de l’adoption. Gilles Bon-Maury, président d’Homosexualités et Socialisme, précise qu’à ses yeux, «Hollande incarne la famille politique en faveur de l’égalité des droits. Rappelez-vous: en 1981, ce sont les socialistes qui ont dépénalisé l’homosexualité!» Reste que les jeux ne sont pas encore faits et que d’ici les 22 avril et 6 mai, les homosexuels ont encore le temps de changer d’avis. Comme n’importe quel Français.