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 d’ADHEOS

 Le comédien et présentateur québécois Jasmin Roy a jeté un pavé dans les librairies avec son livre Osti de fif!, un titre volontairement provocant qu’on pourrait traduire par “sale pédé!”. Cette injure, Jasmin Roy l’a subie de l’école primaire jusqu’au lycée. Il témoigne aujourd’hui pour mieux dénoncer l’homophobie qui hante toujours le milieu scolaire.

 
 
« Les abus et les humiliations sont rapidement venus de l’ensemble des élèves et se sont multipliés comme se serait répandue une maladie contagieuse », écrit Jasmin Roy alors que ses parents quittent Montréal pour s’installer dans un village québécois, à l’été 1977. Pour lui, ce déménagement sera synonyme d’enfer quand viendra l’heure de la rentrée scolaire. À peine est-il monté dans l’autocar qu’il subit gifles et coups de poing des autres élèves, agrémentés d’insultes comme « Tu veux nous sucer? » ou « Pisses-tu assis, Jasmine? ». Pendant plus de cinq ans, il subit quotidiennement son lot de brimades qui l’enferme dans la peur et le silence. Face à lui, ses parents demeurent impuissants et les professeurs se taisent quand il n’encouragent pas les injures des élèves.
 
DES BRIMADES À LA DÉPRESSION
Ouvertement gay, le comédien et présentateur de 44 ans n’avait encore jamais révélé ses terribles souvenirs. « Ce sont les témoignages des jeunes, qui vivent aujourd’hui les mêmes atrocités que celles que j’ai connues il y a 27 ans, qui m’ont décidé à écrire, explique-t-il. Comment se fait-il qu’à l’école, on fasse encore autant de discriminations? Du coup, j’ai écrit mon histoire pour montrer toutes les conséquences que cela a eu sur ma vie ».
 
Car un autre enfer s’est ouvert à lui suite à ses années de souffrance. Alors qu’il triomphe à 27 ans dans la série télé populaire Chambres en ville, son passé le rattrape à coups d’insomnie, d’angoisse maladive et de crises de larmes qui lui font perdre tous ses moyens. « Les gens me disent aujourd’hui que je suis courageux mais quand tu te réveilles en plein milieu de la nuit et que tu es envahi par l’anxiété, que tu es incapable de te contrôler, que tu tombes à terre sans connaissance et que l’émotion est trop forte, là je pense que ce n’est plus une question de bravoure, mais plutôt: soit tu agis, soit tu crèves’. Après les antidépresseurs combinés à des bêtabloquants, la délivrance viendra de thérapies et d’une psychanalyse qui lui permettront de faire table rase de son passé scolaire.
 
L’HOMOPHOBIE PERSISTANTE À L’ÉCOLE
Plus qu’un simple témoignage, Osti de fif! tire la sonnette d’alarme sur l’homophobie qui poursuit ses ravages sur les bancs de l’école. Jasmin Roy consacre un chapitre aux jeunes qu’il a rencontrés et vivent aujourd’hui le même calvaire. Ils ont entre 16 et 24 ans, ils s’appellent Maxime, Jolyane, Antoine ou David et les insultes homophobes sont encore leur pain quotidien. Pour l’auteur, « c’est surtout à cet âge-là qu’il faut protéger nos jeunes de ces situations car une fois adulte, certains seront incapables de faire leur place et connaîtront des troubles mentaux ».
 
Il en appelle donc à des mesures concrètes: « Il faut une politique de tolérance zéro face aux insultes homophobes. Beaucoup d’adultes n’accepteraient pas que leurs enfants s’expriment de même à l’école et encore moins à la maison. Une réflexion sur l’homophobie doit être engagée au niveau des professeurs, notamment les profs de sport. Il faut des interventions, qu’on éduque nos enfants à la réalité homosexuelle. Si l’on instaure des lois d’égalité pour les LGBT, cela doit s’appliquer également à l’école. Dans un an, s’il n’y a pas de choses concrètes qui sont faites sur le terrain, je ferais une sortie publique. Tu ne peux pas sortir un livre comme celui-ci et ne pas attendre des résultats ». L’appel est donc lancé, espérons qu’il soit entendu.
 
Osti de fif!, de Jasmin Roy (Les Intouchables).