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 d’ADHEOS

Avec son documentaire «Naître père», au cinéma depuis mercredi, Delphine Lanson suit l’odyssée américaine de deux papas gays qui ont fait appel à une mère porteuse. La réalisatrice revient pour TÊTU.com sur la génèse de ce film.
 
En plein débat sur la gestation pour autrui (GPA), le documentaire Naître père (actuellement en salles) apporte un regard intime, précieux, jamais voyeuriste sur le sujet. On y suit l’odyssée américaine de deux papas, Jérôme et François (photo), qui ont fait appel à une mère porteuse pour mettre au monde leurs jumeaux. Après l’interview de l’un des deux papas, François, TÊTU propose celle de la réalisatrice Delphine Lanson. La documentariste revient sur la genèse du film et les difficultés qu’elle a rencontrées, souvent inattendues.
 
TÊTU.com: Comment est né ce documentaire, car à la base, c’est tout de même l’histoire très intime de deux pères vers la paternité. Ils auraient pu ne pas avoir envie d’être suivi par une caméra?
 
Delphine Lanson: En fait, je suis venue vers eux. Ils n’étaient alors que des connaissances, pas des amis. Je venais de devenir maman et je me posais beaucoup de questions sur le processus, leurs intentions, leurs rapports avec la mère porteuse… J’étais touchée par ces deux pères qui avaient un tel désir de paternité. D’autant qu’autour de moi j’avais surtout des histoires de pères qui se désinvestissaient.
 
D’autres réalisateurs leur avaient proposé de les suivre. Je crois que ce qui les a décidés à me suivre, c’est qu’il était hors de question que ce film se fasse au détriment des enfants. Et que s’ils étaient eux, ou la mère porteuse, un tant soit peu gêné à un moment ou à un autre, j’arrêterais de filmer… Au final, tout s’est fait très sereinement avec une complicité qui s’est mise peu à peu en place. Et ils ont oublié la caméra et ma présence…
 
On imagine que ce type de projet n’a pas été forcément facile à monter dans la logique du cinéma ou de la télévision d’aujourd’hui…
C’est très vrai. Si je n’ai eu aucune difficulté avec les papas, la mère porteuse, leurs familles, le corps médical américain… je suis parti au début de l’aventure sans aucun fonds mais avec des productrices qui m’ont soutenu de bout en bout. C’est une fois que le film terminé que j’ai vu de vrais obstacles…
 
Vous avez surmonté beaucoup d’obstacles?
Des chaînes m’ont notamment opposé le fait que cette aventure se passait «trop bien»! Elles questionnaient le fait par exemple que la mère porteuse ne pouvait pas être épanouie par sa démarche. On me demandait un contre point négatif sur le sujet. Cela m’a beaucoup surprise. Je n’ai donc pas pu trouver de fonds publics car on me reprochait de donner une vision trop positive de la GPA. Il aurait fallu que j’invente des difficultés qui n’ont pas existé…
 
Avez-vous pensé à une sortie cinéma tout de suite? Parce qu’il y a une écriture visuelle pour le cinéma et la télévision en matière de documentaire?
Au départ, je suis partie sans apriori. Je voulais juste vivre cette aventure avec ces deux papas. J’ai eu au final 83 heures de rush. Ce sont les productrices qui m’ont poussé à faire un format long pour le cinéma. Mon parcours est plus cinématographique et ensuite tout n’a été qu’évidence. Je voulais accompagner ce film de débats et quoi de mieux qu’un film et une salle pour le faire.
 
Vous n’avez pas pensé faire une série documentaire?
Si, mais il y aura au final beaucoup de bonus dans le DVD!
 
Ce film va peut-être être vu par certains comme un film politique ou militant?
Quand Naître père a été tourné, le projet de loi n’était pas d’actualité. Le film est une histoire d’amour. Si je dois avoir une position vraiment politique, c’est de mettre l’intentionnalité au cœur de la parentalité. On ne peut pas dire que des parents intentionnels ne sont pas des parents parce qu’ils ne sont pas des parents génétiques.
 
Vous avez montré le film à des responsables politiques?
Le film est un élément de dialogue. Des gens, pro et anti, l’ont déjà vu. En tout cas, je me rends compte que je sujet est très sensible. Je vais accompagner au maximum le film en France et à l’étranger, où il est déjà sélectionné dans beaucoup de festivals.
 
Avez-vous envie de retrouver les deux papas, la mère porteuse et l’enfant dans quelques années?
On en a parlé, et il n’est pas du tout insensé de le penser. Mais nous le ferons d’une façon positive pour l’enfant. Il y a en tout cas l’envie de se retrouver.
 
Quel sera le thème de votre prochain film?
Oui, il s’agira de l’histoire d’un homme, un photographe qui est en train de perdre la vue et qui va plonger au cœur de lui-même. Avec un traitement très fantastique.
 
Naître père, de Delphine Lanson. En salle actuellement.