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 d’ADHEOS

My Best Men, la nouvelle comédie de Stephan Elliott, le papa de Priscilla folle du désert, sort sur les écrans français ce mercredi. Le réalisateur bientôt quinquagénaire a imaginé une comédie aussi déglinguée que sexy. Après avoir échappé à la mort en 2004, il a fait récemment un coming out aussi joyeux que militant. Rencontre avec un Australien attachant et expansif.
 
TÊTU: D’où est venue l’idée du film My Best Men?
Stephan Elliott : Beaucoup de metteurs en scène s’enorgueillissent de leurs passé. Spielberg est très fier de dire qu’il a commencé très jeune à faire des films en super 8. Tarantino de raconter qu’il a grandi dans un vidéo-club. Moi, mon premier boulot, c’est d’avoir été celui qui vient dans un mariage et filme la cérémonie. J’avais 14 ans. J’ai dû assister à plus de 2.000 mariages dans ma vie. De très grands souvenirs. J’y ai vu les choses les plus drôles, les plus trashs. J’aurais pu faire dix films à partir de mon expérience.
 
Qu’est-ce qui vous a amusé dans cette comédie sur le mariage, un genre souvent exploré au cinéma?
Tout le monde a assisté à un mariage catastrophe. Celui où un convive boit tellement qu’il devient une honte pour ses proches. Souvent au cinéma, on montre la version à l’eau de rose. J’ai voulu imaginé une version, dirons-nous, plus couillue…
 
Comparé a beaucoup de comédies américaines, votre distribution masculine est particulièrement sexy?
Vous l’avez remarqué aussi (il éclate de rire). Quand on me connaît un peu, on ne devrait pas être surpris!
 
Vous avez aussi convaincu Olivia Newton-John de participer à l’aventure. Et lui permettant de retrouver de ce fait ses racines australiennes…
J’ai assisté à tant de mariages où la mère de la mariée était vraiment la plus barrée de la cérémonie. J’ai donc eu envie de bousculer Olivia. Elle était terrifiée par ce rôle très épicé. Et même temps, je crois que ce film arrive au bon moment de sa carrière. Olivia n’a plus rien à prouver. Elle pouvait donc se lâcher. Et aujourd’hui, on la redécouvre presque! Elle s’est vraiment amusée.
 
Elle a pourtant des scènes très… crues!
Un jour, en plein d’un milieu d’une scène, elle s’est arrêtée et m’a regardée en me disant: «Tu crois qu’après ça, on va encore m’engager?» Et en éclatant de rire, elle a crié: «Après tout, qu’est-ce que j’en ai à f…».
 
Vous êtes, et vous resterez à jamais, l’homme qui a créée Priscilla, folle du désert. N’en avez-vous pas assez de ces trois drag queens?
 
J’ai eu des relations contrastées avec ce trio de vieilles peaux. Pendant longtemps, l’ombre de ces créatures m’a vraiment pesé. Et un jour, j’en ai parlé avec le créateur du Rocky Horror Picture Show (Jim Sharman, NDLR). Il m’a dit: «Arrête de geindre. Tu ne peux pas imaginer le nombre de metteurs en scènes, d’auteurs, qui auraient aimé être à ta place pour créer des personnages qui font partie de la pop culture mondiale.» J’ai mis du temps à comprendre que le phénomène Priscilla était en fait un cadeau pour moi. Et quand je vois le nombre de gamins qui viennent me voir en me disant que ce film les a aidés à faire leur coming out, je suis fier.
 
Vous vous souvenez de la première mondiale du film à Cannes?
Oh que oui! Les gens dansaient. Le film a été à Cannes comme Ballroom Dancing ou Le mariage de Muriel (autres comédies australiennes, NDLR). Ces films ont fait ensuite le tour du monde et ont fait connaître notre pays. Je crois qu’avec Baz (Luhrman pour Ballroom Dancing) ou P.J (Hogan pour Le mariage de Muriel), on a essayé de bousculer une certaine bonne conscience anglo-saxonne. Mais avec de l’amour et de l’humour.
 
Priscilla a été adaptée en comédie musicale. On parle aujourd’hui d’un remake aux Etats-Unis. Qu’en est-il exactement?
Je commence dans quelques jours à la télé australienne un «talent show» pour trouver de nouveaux acteurs (nommé I Will Survive: Priscilla, lire notre article). La comédie musicale va être remontée à New York, et peut-être à Paris. Priscilla vient juste d’être lancée à Milan et São Paulo. On est reparti pour vingt ans. Et peut-être que quelqu’un aura envie d’en faire un remake. J’avoue que cela m’amuserait de me replonger dans le sujet. Et de le faire en 3D!
 
Vous pourriez tourner des blockbusters, on vous en a d’ailleurs proposé. Ne préfériez-vous pas être Roland Emmerich (le metteur en scène de 2012, ouvertement gay, de 2012 ou Independance Day)?
Jacques Tati, Blake Edwards, Tex Avery, et Chuck Jones sont mes maîtres. J’ai grandi avec eux. Etre Michael Bay et avoir 200 millions de dollars de budget pour casser tous mes décors, j’ai passé l’âge. Quant à Roland, c’est un garçon très bien. Il y a longtemps, il a essayé de sortir avec moi!
 
Votre filmographie est quasiment uniquement composée de comédies. Pourquoi vous cantonnez-vous à ce genre?
On dit que c’est le genre le plus difficile. Mais si quelque chose me fait rire, j’en conclue que d’autres devraient rire aussi avec moi. La seule fois où j’ai tenté un thriller, c’était avec Voyeur. J’avais pourtant Ewan McGregor en face de moi, mais ce n’était pas mon élément. Aujourd’hui, j’ai envie de m’amuser. Je suis passé trop près de la mort pour avoir envie de voir les choses en noir.
 
Justement, il y a cinq ans, vous avez eu un très grave accident de ski en France…
Mon corps était en miettes. Je ne devrais plus jamais remarcher, rester presque paralysé. Quand vous survivez à ce type de malheur, vous avez juste envie ensuite de vous marrer jusqu’à la fin de vos jours!
 
Dans quel état d’esprit avez-vous été après votre accident?
J’ai eu l’impression que c’était une sorte de punition que j’avais mérité car j’étais heureux. J’avais du succès, un homme qui m’aime, une belle carrière. Je devais en quelque sorte payer ma dette. C’était ridicule, mais cela m’a traversé longtemps l’esprit.
 
Il y a quelques mois, vous avez fait votre coming out pendant la cérémonie des Oscars australiens. Pourquoi?
Je pense qu’après avoir côtoyé la mort, vous n’avez plus envie de vivre dans le déni de votre sexualité. Qu’est-ce que j’ai à craindre aujourd’hui? Beaucoup de gens savaient que j’étais homo, je suis avec mon petit ami depuis vingt ans. Mais je n’avais pas très envie que cela se sache. Je voulais juste protéger mon petit confort personnel. Mais je sens aujourd’hui, et dans beaucoup de pays, la montée d’une homophobie qui s’assume en tant que telle. Même en Australie. C’était ma façon de lui faire un pied de nez.
 
Vous vous sentez désormais un militant?
Non, encore mieux, un combattant. Vous savez, les Australiens aiment la castagne. S’il faut me battre contre les préjugés, je suis prêt!
 
Vous avez eu votre accident en France. Vous avez dû rayer notre pays de la carte ?
Pas du tout! Je suis même revenu à Courchevel à l’endroit précis où j’ai eu mon accident. Juste pour faire la nique au destin. J’aime Paris, entre autres pour y voir ma copine Kristin Scott Thomas. J’ai travaillé avec elle sur Easy Virtue, c’est la femme la plus drôle que je connaisse. Je crois qu’elle me tuera quand elle verra que j’ai donné le rôle de la mère à Olivia Newton-John!