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 d’ADHEOS

Je n’ai jamais trop aimé crier avec les loups, aboyer sans réfléchir et me noyer dans la masse. Je me suis toujours méfié d’une vision du monde qui serait exclusivement vue par les œillères homos.
  
Parce que c’est la crise. Ça ne vous concerne peut-être pas, vous qui consommez comme si de rien n’était, vous qui vous vautrez dans les pires clichés homos, vous qui votez à gauche pour vous donner bonne conscience, vous qui vous extasiez sur la soupe musicale que vos icônes vous crachent à la figure. Je ne comprends pas comment une communauté dans laquelle la crise fait des ravages, eu égard au consumérisme effréné qui y remplace un peu trop le lien social, peut être aussi insensible à la crise et à la politique austéritaire du gouvernement tout en étant aussi engagée pour le mariage.  
 
Avant le mariage gay, il y a la crise  
 
C’est tellement plus facile de manifester pour le mariage. C’est vrai. Les homos manifestent pour le mariage. Les Palestiniens manifestent contre Israël. Vous ne trouvez pas ça un peu trop simple ? Un peu trop bête et méchant ?  
 
Je ne voudrais pas jouer avec le feu, hiérarchiser l’importance des sujets d’actualité, mais la crise c’est chez nous. Ce n’est pas seulement en Grèce, ce n’est pas seulement à Gaza. Non, non, chez nous, en France, des milliers de jeunes diplômés sont contraints de faire des fausses conventions de stage sur une version piratée de Photoshop, parce que sur 100 offres d’emplois, il y a 90 stages payés 417,54 euros. Parce que les entreprises emploient jusqu’à 30% de stagiaires, en lieu et place de vrais postes, parfois à responsabilités. C’est illégal, mais personne ne dit rien, personne ne fait de procès, tout le monde a peur.  
 
Par ailleurs, combien d’emplois vont disparaître ou ont déjà disparu pendant la crise ? Quelques dizaines de milliers ? Vous vous en foutez des ouvriers des usines du Nord, vous ne savez même pas ce qu’ils y fabriquaient, dans leurs usines, des trucs bizarres qu’on ne connaît pas. Vous vous en foutez des couturières qui se font remercier – remercier – après des années de labeur dans les bleds de province, vous continuez à faire des razzias chez H&M comme des con(ne)s parce que la collection capsule Martin Margiela vous fait des papillons dans le ventre, et tant pis si c’est fabriqué en Chine.  
 
Et les suicides au bureau, on n’en parle plus, bizarrement, des suicides au bureau ? Pire, on hurle au scandale quand "The Economist" tire la sonnette d’alarme. C’est curieux, cette façon de sélectionner l’information. Cette façon de n’être révolté que par les manifestations contre le mariage gay.  
 
J’aurais aimé répondre par l’indifférence  
 
Et pourtant. Moi qui aurais aimé répondre à ceux qui défilent contre le mariage par l’indifférence, parce que je juge d’autres choses plus importantes, je vois que les arguments des anti-mariages ne sont pas beaucoup plus évolués que ceux qui, au collège, me traitaient de tapette parce que je faisais de la danse contemporaine au lieu de faire du taekwondo.  
 
Oh, pourtant, ils ont vieilli. Ils auraient les capacités intellectuelles de comprendre que nous sommes dans un pays laïc et que l’Église n’a pas vocation à se mêler d’une loi promulguée par l’État. Ils auraient les capacités intellectuelles de comprendre que le mariage gay ne leur retire aucun droit. Ils auraient les capacités intellectuelles de comprendre une donnée statistique aussi complexe que celle qui nous montre qu’un enfant sur deux naît hors mariage.  
 
Quand je les vois s’agiter sur mes écrans, j’aurais bien envie de leur retirer quelques droits, tiens, comme le droit de vote. Mais non. Je suis un républicain. Je ne leur retirerai pas le droit de vote, même si je suis très tenté de faire exercer mon droit de conscience.  
 
Le droit de conscience de François Hollande. Comment s’attirer les foudres d’une communauté entière, comment donner des arguments à ceux qui sont contre le mariage gay, comment faire pour qu’en quelques heures une communauté entière puisse se tromper d’ennemi et se retourne violemment contre un gouvernement dit de gauche, comme elle ne l’avait pas fait contre un gouvernement pourtant bien à droite. Un exemple supplémentaire, s’il en fallait un, qui montre la lâcheté du pouvoir, incapable de défendre franchement, fermement, sans nuance, sans ronds de jambes, ce qui sera(it) une des rares mesures de gauche de son mandat.  
 
J’irai à la manifestation du 16 décembre  
 
Alors non, je n’oublierai pas que c’est la crise et qu’on devrait penser à se battre contre l’austérité d’une façon aussi véhémente que ceux qui se battent pour le mariage gay. Pourtant, j’irai à la manifestation du 16 décembre. Et tant pis s’il y a trop de paillettes à mon goût. Tant pis s’il y a trop de jeux de mots gays pourris sur les banderoles.  
 
Parce que j’en ai assez d’entendre que je suis un garçon pas comme les autres. Parce que j’en ai assez d’entendre que les homos sont des pervers qui finiront par baiser leur chat si on leur donne le droit de se marier. Non, sérieusement, venez chez moi. Vous verrez. Certes, c’est un poil mieux décoré que chez pas mal de couples hétéros. Mais, comme dans un couple hétéro, on s’engueule pour la vaisselle qui traîne depuis deux jours, on stresse quand on reçoit la belle famille parce que la blanquette ne sera jamais prête à temps et on fait l’amour, tous les deux, sans se tromper, et sans le chat : il ne fait que nous juger d’un air altier une fois que nos têtes basculent vers lui après l’orgasme.  
 
Pour défendre cette vision de l’homosexualité qui n’a d’homo que la sexualité, justement, et tout simplement pour pouvoir me marier le jour où j’en aurai envie, comme tout le monde, je retirerai mes œillères communautaristo-sceptiques, je manifesterai le 16 décembre et je me noierai dans la masse. Et avec plaisir.