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 d’ADHEOS

Le débat autour du mariage pour tous est loin d’être clos. Entre la manif des «contre» et celle des «pour», un homo charentais de 31 ans prend la plume.
 
«Comment être, seulement, et se réveiller ce dimanche en espérant pouvoir passer outre ces informations qui nous replongent bien des années en arrière – parmi les pires; outre les témoignages violents et avilissant; outre la preuve de cette intolérance, quand ce n’est pas de la haine, face à une part de ce qui fait ma nature et si peu, finalement, de mon essence; outre les nouveaux stigmates, fruits de ce que je n’ai pas plus choisi que mon prénom ou l’endroit où je suis né; outre le fait qu’on parle encore de mes pairs et de moi-même comme d’une sorte de sous-hommes déséquilibrés; outre l’insulte de l’amour que je porte et de celui qui l’accueille; outre une nouvelle mise au ban de cette société qui n’oublie pourtant pas de faire appel à nous comme aux autres, chaque jour, sans le si simple retour respectueux qu’elle se devrait de nous consacrer, à nous qui, aussi, contribuons, construisons, créons… Sommes.
 
Je suis à vos côtés et je ne vous ai pas choisis non plus. Je sais que vous existez et ne vous discrimine pas. Je n’adhère pas non plus à tout ce que vous êtes, et ne vous demande pas de m’aimer, ni même d’acquiescer, mais juste de me reconnaître, homme et citoyen à part entière…
 
Parce que c’est bien seulement ce que je souhaite, pouvoir vivre un jour: être enfin quelqu’un qui peut s’unir à celui qu’il a choisi, sans avoir, lorsqu’il renseigne un questionnaire, à épouser un statut encore une fois différent à propos d’aimer et de vouloir donc partager, vraiment, sa vie…
 
Je souhaite, lors de mes derniers instants, avoir offert à celui que j’aime les mêmes protections qu’à toute veuve ou tout veuf.
 
Je souhaite, lors de ses derniers souffles, pouvoir lui assurer que j’aurai les moyens de prendre soin du foyer que nous aurons construit ensemble, et que l’État, qui est aussi le nôtre, ne sera pas une entrave. Enfin, je condamne solennellement ce dernier qui, au moment de rétablir notre dignité, a mêlé plusieurs débats auxquels nous ne pouvons répondre en un temps.
 
La situation actuelle est le résultat de centaines d’années de persécution, d’abord, puis de rejet de notre condition de la part des pouvoirs, quels qu’ils soient.
 
Nous ne pouvons donc demander à la société que nous constituons d’être prête, et d’adhérer à tous les aspects de l’humanité en une fois.
 
Il est par là essentiel à mon sens que nous sachions traiter chacune de ces questions avec l’attention, la justesse, l’apaisement, et le respect qui leur sont nécessaires. J’exige aujourd’hui que l’on applique à mon effet ce que la Déclaration universelle des droits de l’homme prévoit pour tout un chacun, et dont je ne citerai que l’article 7:
 
«Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination».
 
Malgré ce texte que plus personne n’oserait contester, je vis dans un pays qui m’exclut encore légalement et dans un monde où soixante-seize pays légalisent encore ces discriminations, dont cinq par l’application de la peine de mort.
 
S’agissant de devenir parent, je me réclame, comme aux autres, le droit et le pouvoir de réfléchir, puis de répondre avec la bienveillance et le temps qui nous seront utiles et suffisants.
 
Je fais donc uniquement le souhait de ne pas être traité différemment dans ma condition, aux yeux de la loi, et notamment face au mariage.
 
Je n’ai pas fait de choix.
 
Mais un jour, j’ai naturellement aimé, comme vous.
 
J’aurais pu être vous.
 
Vous auriez pu être moi.
 
Ne l’oubliez pas…
 
Permettez-moi enfin d’être et de vivre, comme vous, comme eux, ailleurs, que l’on a un jour acceptés.
 
Un chien ne m’a jamais mordu parce que j’aime un homme plutôt qu’une femme. Et vous?