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 d’ADHEOS

La bataille d’Arcangues n’aura pas lieu. Jean-Michel Colo, maire divers droite d’Arcangues (Pyrénées-Atlantiques) et catholique, était prêt à résister, seul contre tous, aux lois de la République et surtout au mariage homosexuel. Puis, après quelques jours où il a enchainé les déclarations tonitruantes, l’élu a finalement décidé, jeudi 13 juin, lors d’une réunion municipale, de laisser retomber le soufflet médiatique et d’envisager d’accorder la délégation à une élue.
 
L’histoire a débuté fin mai. Jean-Michel Martin et Guy Martineau-Espel font les démarches administratives pour se marier après seize ans de vie commune. Résidant depuis dix ans à Arcangues, c’est sous les volets bleus de la mairie du bourg qu’ils posent une discrète demande. Mais la fête est reportée. La loi a beau avoir été votée définitivement le 23 avril et les premiers mariages célébrés, les deux hommes se heurtent à une fin de non-recevoir de leur élu et officier d’état civil.
 
"Nous avons informé le préfet que nous ne célébrerions aucun mariage homosexuel", déclare début juin Jean-Michel Colo au Journal du Pays Basque, avec le soutien de l’ensemble de ses adjoints. Trente années que M. Colo est l’édile de sa commune, ce n’est pas sous son mandat que deux hommes se diront "oui" avant de s’embrasser sous le portrait du président de la République, même si c’est celui de François Hollande. "Je sais ce que je risque !", fanfaronne le maire dans les colonnes du Figaro du 10 juin. Il multiplie les déclarations chocs aux médias "J’irai jusqu’à la potence, balance-t-il, bravache. Iront-ils jusqu’à faire de moi une victime ?"
 
L’INCOMPRÉHENSION DES FUTURS MARIÉS
 
"C’est une humiliation, estime Guy Martineau-Espel. Surtout qu’il n’a jamais été question pour nous de faire un battage autour de notre union. Nous voulions juste un mariage tranquille, organisé chez nous. Il n’a jamais été question de refaire à Arcangues une version locale de Priscilla, folle du désert, le film de Stephan Elliott. Je sais que la loi m’autorise à me marier dans ma ville de naissance, mais je suis né en Algérie. Tenter un mariage homosexuel là-bas… on n’en revient pas vivant ! Mais même ici, il fallait bien qu’un premier couple homosexuel se voie refuser le mariage… Cela nous tombe dessus", regrette Guy Martineau-Espel d’une voix lasse.
 
En réponse au maire, Les Bascos, une association des lesbiennes et gays du Pays basque, alerte Colette Capdevielle, député socialiste des Pyrénées-Atlantiques, qui saisit la préfecture et le ministère de la justice. En voulant faire d’Arcangues une forteresse anti-mariage homosexuel, Jean-Michel Colo a élaboré une ligne Maginot qui se fait déborder de partout. Il est rappelé à l’ordre par la sous-préfecture de Bayonne. Pointé du doigt par les parlementaires du département. Avertit, début juin, par le ministre de l’intérieur Manuel Valls des lourdes sanctions qu’il encoure (une révocation accompagnée d’un an d’inéligibilité ainsi que trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende). Le bouillant maire d’Arcangues voit autour de lui se former un cordon sanitaire. Même Vanik Berberian, président de l’Association des maires ruraux de France, lit dans la posture de son confrère, "la recherche d’un coup de projecteur médiatique". "Lorsqu’on est élu, on respecte la loi. Point.", ajoute-t-il. Depuis, Jean-Michel Colo ne décroche plus son téléphone.
 
"Jean-Michel Colo s’est fait complètement dépasser par cette histoire", analyse Colette Capdevielle. Le maire s’est cru sur une île isolée de la République : Arcangues, qui continue de vivre bercée par la voix de Luis Mariano. Ce dernier, avait choisi ce joli village pour y terminer sa vie. "Mais les mentalités changent et pas forcément vers plus de tolérance. Lorsque, il y a quelques décennies, Mariano déambulait dans les rues avec Patchi Lacan, son ‘frère de cœur’, cela ne dérangeait personne", explique l’élue socialiste.