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 d’ADHEOS

Au terme d’un long combat judiciaire, Sonia Marchesi a obtenu le droit de changer ses papiers d’état civil, alors qu’elle ne souhaitait pas subir d’opération chirurgicale. 
 
La Corte Suprema di Cassazione (la Cour suprême de cassation, soit l’instance finale de la justice italienne) a tranché hier en faveur de Sonia Marchesi. Après plusieurs années de lutte, cette femme trans’ a finalement réussi à obtenir de la justice son changement d’état civil, sans être contrainte de passer par une opération de réassignation.
 
Sonia Marchesi, 45 ans, est originaire de Piacenza dans le nord du pays. Elle travaille dans une agence de voyages. C’est en 1999 qu’elle a commencé les longues démarches pour se faire opérer, des démarches qu’elle a finalement choisi de ne pas faire aboutir. A alors débuté une longue bataille juridique pour obtenir le droit de changer son état civil, avec son avocate Alessandra Gracis, elle-même trans’. D’abord le tribunal de Piacenza, puis la cour d’appel de Bologne ont rejeté sa demande. En cause, selon Maria Grazia Sangalli, la présidente du Rete Lenford, un réseau d’avocat.e.s spécialistes des droits des personnes LGBT, une «interprétation restrictive» de la loi de 1982 qui autorise la modification des documents d’état civil pour les personnes trans’. La loi, modifiée depuis, prévoit une autorisation du tribunal pour le traitement de réassignation si cela est «nécessaire». Au vu de cette définition peu précise, peu de tribunaux donnent leur feu vert pour le changement d’état civil, si le/la demandeur/euse n’a pas subi une opération irréversible.
 
Lundi 20 juillet, la Cour suprême de cassation a statué que Sonia Marchesi avait le droit d’avoir un état civil conforme à son genre: «Le désir de réaliser la coïncidence entre soma et psyché est le résultat de l’élaboration douloureuse de sa propre identité de genre avec l’appui d’un traitement médical et psychologique.» La décision ne remet donc pas en cause la médicalisation du processus, mais a le mérite de ne pas imposer la stérilisation et/ou la chirurgie aux personnes trans’: «L’intérêt public à la définition de certains genres, même en considérant les implications qui peuvent surgir concernant les relations familiales et filiales, ne nécessite pas le sacrifice du droit à préserver l’intégrité physique et psychologique» La cour a par ailleurs soutenu que la transition est «le résultat d’un parcours individuel».
 
"PRESQUE UNE RÉVOLUTION"
«Aujourd’hui, c’est presque une révolution!» a affirmé Sonia Marchesi, après le verdict. Le Rete Lenford a salué la décision historique de la Cour suprême de cassation: «La chirurgie de réassignation, lorsqu’elle n’est pas le résultat d’un choix personnel, porte atteinte à l’intégrité physique et la dignité humaine, a rappelé Maria Grazia Sangalli. Dans de nombreux cas, des thérapies et des interventions hormonales sur les caractères sexuels secondaires garantissent aux personnes d’atteindre leur équilibre et de fixer leur identité de genre, indépendamment de la modification chirurgicale des caractères sexuels primaires, ce qui implique des interventions douloureuses, invasives et avec des conséquences négatives dans un pourcentage élevé de cas.» L’association locale Arcigay Piacenza a aussi félicité le Rete Lenford et Sonia Marchesi pour leur long combat: «Tout cela montre que – malgré un climat pas vraiment progressiste – même une ville comme Piacenza peut apporter sa contribution à l’avancement des droits civils en Italie. En 1994, Piacenza a été choisi par le réalisateur Alessandro Benvenuti pour faire le film Belle al Bar, peut-être le seul film italien au monde dans lequel une personne trans’ a été dépeinte d’une manière positive et avec une protagoniste victorieuse (jouée par Eva Robin’s): il est agréable de voir que vingt ans plus tard, les protagonistes trans’, à Piacenza, ne sont plus seulement dans les films, mais sont devenus une réalité.»
 
En avril 2015, c’est à nouveau la justice qui avait tranché en faveur d’Alessandra Bernaroli, une femme trans’ mariée qui a lutté contre l’annulation de son mariage avec sa compagne, contracté avant sa transition et invalidé lors de son changement d’état civil. Ces deux décisions progressistes inciteront-elles le législateur à revenir sur la loi de 1982?