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 d’ADHEOS

L’ancien député et ancien sénateur Jean-Pierre Michel est décédé dimanche 24 janvier. Il était l’un des pères du Pacs et un défenseur pugnace de l’égalité des droits pour les personnes LGBT+.
 
C’est un combattant, une figure majeure de l’égalité des droits qui s’en est allée. L’ancien député et ancien sénateur socialiste Jean-Pierre Michel est décédé dimanche 24 janvier à 82 ans, a appris l’AFP de sources parlementaires. Le magistrat, élu en Haute-Saône avait été l’un des initiateurs dans les années 1990 du Pacte civil de solidarité (Pacs), puis rapporteur convaincu du projet de loi sur l’ouverture du mariage aux couples de même sexe au Sénat.
Dix ans de travail pour une union homo
 
Bien avant le vote du Pacs en 1999, un groupe de travail planche sur un contrat d’union civile (CUC) dès 1991. Avec le sida, des centaines de conjoints d’hommes victimes de l’épidémie se retrouvent souvent exclus de la vie qu’ils ont construit avec leur partenaire, par des familles qui refusent de reconnaître le couple homosexuel. Ce projet de "contrat" entend donc assurer au conjoint survivant des droits. "Quand on a commencé à chercher des députés qui soutiendraient le Contrat d’Union Civile, Jean-Pierre Michel s’est très vite signalé" se souvient Denis Quinqueton, ancien président d’Homosexualités et Socialisme et co-auteur, avec Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche, de L’incroyable Histoire du Pacs.
 
"Il a travaillé d’arrache-pied, et a redéposé le texte en 1993 et a interpellé le ministre de la Justice Jacques Toubon en 1996 sur la mise à l’ordre du jour du texte." Réponse du ministre de l’époque : « il n’est pas question de créer le contrat d’union civile, il est au contraire question de favoriser dans le pays les mariages et les naissance".
 
Quand à la faveur des élections législatives de 1997, après la dissolution de l’Assemblée par Jacques Chirac, la gauche redevient majoritaire dans l’hémicycle, le contrat d’union civile devient le Pacs. Et Jean-Pierre Michel – rapporteur – en est l’un des plus grands défenseurs. "Il m’a raconté que pendant le Pacs et le mariage pour tous, il recevait beaucoup de courriers d’électeurs. Il a répondu à chacun – peut-être pas aux messages d’insultes, mais à tous ceux qui doutaient – pour leur expliquer, en argumentant, pourquoi cette réforme était utile."
 
Rapporteur du Pacs
 
Après deux ans de bataille, le jour du vote, Jean-Pierre Michel s’adresse à ses collègues de la droite. Si les larmes de Roselyne Bachelot, aujourd’hui ministre de la Culture, sont restées dans les mémoires, le rapporteur du projet de loi avait dénoncé l’hypocrisie de certains membres du RPR. "C’est une forme d’injustice de ne pas se souvenir de lui et de se rappeler de Roselyne Bachelot", regrette Quinqueton. "Il avait fait un discours cocasse, où il appelait tous ceux qui lui avaient dit dans les couloirs ‘on s’oppose au texte mais c’est toi qui a raison’ à s’abstenir de voter." A droite, seuls Philippe Séguin, Jean-Louis Borloo et Alain Madelin se sont abstenus.
 
Jean-Pierre Michel aurait pu s’arrêter sur ce coup d’éclat. Mais c’était sans compter son engagement sur le sujet. "C’est un sujet qui le touchait, il se sentait concerné", raconte Denis Quinqueton. "Son passé de magistrat a façonné son travail politique. Des injustices, il en a vu, et de très près. Cela peut expliquer son implication très forte et constante. En trente ans de carrière parlementaire, il n’a jamais lâché l’affaire."
 
Détermination
 
Il devient rapporteur du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe, en 2013. Refuse alors de recevoir Frigide Barjot, porte-parole de la Manif Pour Tous. « Je ne vois pas l’utilité de vous entendre, écrivait-il alors à la pasionaria anti-mariage. Vous représentez la pire des homophobies (…) Vous êtes dans le déni d’homophobie, comme d’autres sont dans le déni de racisme.
 
" Quand le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a commencé à flancher sur le sujet, et que François Hollande s’est fait plus hésitant, lui était absolument déterminé" se souvient Quinqueton. "Il a fait partie des gens qui ont dit ‘même pas en rêve vous plantez le projet’. C’est le genre de détermination dont il était capable. Pour lui, ce n’était pas un sujet décoratif et sa position à la commission des lois lui donnait du poids."
 
"Par ailleurs il n’avait pas peur des sujets compliqués, il était favorables à la GPA et expliquait très clairement pourquoi" ajoute l’ancien président d’Homosexualité et Socialisme, aujourd’hui co-directeur de l’Observatoire LGBT+ de la Fondation Jean Jaurès. La classe politique de 2021 devrait s’inspirer de ses convictions. Se demander pourquoi on fait des réformes. Pas pour répondre à des parts de marché électorales ou pour réagir avec émotion à un fait-divers. C’était un homme qui travaillait vraiment ses textes, et qui savait dans quelle société il voulait vivre. Et qui faisait tout pour la construire."