« J’ai toujours mal et je n’arrive plus à en fermer l’oeil la nuit. Je vis un cauchemar éveillé ». C’est par ces mots que Lauren’s Ovide commence à narrer le violent guet-apens homophobe dont il a été l’objet le vendredi 05 septembre 2025 en soirée, aux alentours de 20H00, au domicile d’une amie sise dans le quartier de Marlique à Pétionville. Une banlieue résidentielle de Port-au-Prince, la capitale haïtienne.
Le corps strié par les coups de fouet, tel un marron jadis cloué au pilori de la plantation, c’est la voix meurtrie et heurtée par le choc du souvenir de l’agression qu’Ovide accepte de nous en livrer les contours dans nos colonnes.
Le témoignage de l’attaque
Lauren’s Ovide : « Ils étaient 5 à 6 armés de fouets en caoutchouc, mais ils avaient également des armes de poing ainsi que des fusils. Mon agression a duré plus de 2 heures où ils m’ont agoni d’injures homophobes et à plusieurs reprises ils ont menacé d’attenter à ma vie. Il critiquait notamment ma maroquinerie jugée trop féminine.
C’est bien moi ainsi que mon homosexualité qui étaient visés, car je suis une personne queer. Pour preuve, le camarade qui était à mes côtés a reçu 3 coups de fouets avant qu’on le laisse partir, tandis que mon calvaire fut plus long. J’ai crû que ma dernière heure était venue.
Hier, j’ai pu recevoir des soins infirmiers auprès d’une clinique de Médecins Sans Frontière située à Delmas 33. Néanmoins, c’est tout mon corps douloureux qui porte les scories de cette attaque. Psychologiquement, je ne retrouve plus le sommeil, songeant sans cesse aux forbans qui ont voulu me déloger de leur quartier.
Il faut dire que je suis habitué aux insultes, mais c’est la première fois que l’on s’en prend à mon intégrité physique. D’ailleurs, ce lundi, je compte aller immédiatement déposer plainte au commissariat, dès la première heure.
Les causes de la persistance de l’homophobie
Actuellement, je suis retourné à mon domicile dans une autre localité où je me sens quelque peu à l’abri. Toutefois je ne souhaite qu’une chose, fuir l’agglomération portoprincienne ou encore mieux fuir ce pays.
Les mentalités n’évoluent pas en Haïti et les gens écoutent n’importe quel prophète autoproclamé qui invite la population à s’en prendre aux personnes LGBT+. Je vise ici plus spécifiquement des « influenceurs », tels que Jean-Richard Richman alias Pasa Pasa sur les réseaux sociaux.
Enfin, je déplore qu’il n’y ait pas un mouvement LGBT+ davantage structuré en Haïti et que l’ensemble du travail du plaidoyer communautaire soit davantage axé sur la lutte contre le VIH/sida que sur les droits humains. J’ai l’impression que la lutte contre l’homophobie reste le parent pauvre de la mobilisation LGBT+ en Haïti ».
- SOURCE 76CRIMES