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 d’ADHEOS

L’Établissement français du sang (EFS) a annoncé la suppression de ses archives des données mentionnant des relations homosexuelles, lesquelles interdisaient jusqu’à récemment aux hommes de devenir donneurs. L’association TOUS.TES avait lancé cet été une pétition en ce sens.

De 1983 à 2016, les hommes ayant des relations homosexuelles avec des hommes (HSH) avaient interdiction de donner leur sang en France. La loi leur a ensuite imposé en 2016 une abstinence d’un an avant le don, délai ramené en 2019 à quatre mois puis abrogé en 2022, lorsqu’a été supprimée toute référence à l’orientation sexuelle dans les questionnaires préalables au don. Pendant près de quarante ans, l’Établissement français du sang (EFS) a donc récolté une masse de données identifiantes concernant des hommes gays et bi, dont elle a annoncé ce vendredi 22 août la suppression prochaine.

« Jusqu’en 2022, nous avons été conduits à collecter, lors des entretiens préalables au don, des données sur ce qui était une contre-indication réglementaire au don de sang, avec la mention HSH », a expliqué la directrice générale déléguée de l’EFS, Sara-Lou Gerber, à l’Agence France-Presse (AFP). En 2022, a-t-elle poursuivi, l’EFS a eu « des interrogations sur ce qu’il fallait faire de ces données » mais a préféré « ne pas les supprimer immédiatement » ; elles ont alors été « archivées » dans le respect du règlement général de protection des données, assure-t-elle, c’est-à-dire conservées dans « une sorte de capsule à part du système d’information, accessible à un nombre très limité de salariés, et cryptées ».

Une pétition contre « le fichage des homosexuels »

Au printemps 2025, une personne a écrit à l’EFS pour connaître les données la concernant, en demander l’effacement et s’interroger plus largement sur la conservation de ces données « HSH ». L’EFS, fait valoir la directrice générale déléguée, « a alors estimé qu’elles n’apportent pas d’élément sur la sécurité transfusionnelle justifiant leur conservation, mais on n’a pas voulu procéder à leur suppression sans en référer au ministère de la Santé et à l’ANSM [l’Autorité nationale de sécurité du médicament] ». L’EFS n’a pas souhaité communiquer le nombre de dossiers potentiellement concernés.

Entretemps, l’association LGBT+ TOUS.TES a lancé fin juillet une pétition contre « le fichage des homosexuels », qui a recueilli près de 16.000 signatures. Aujourd’hui, l’EFS assure que le dossier est « en cours d’expertise informatique » et que « d’ici mi ou fin septembre, le plus gros des données devrait avoir été supprimé, avant des nettoyages complémentaires d’ici la fin de l’année maximum ». Concrètement, précise encore la direction de l’établissement, pour les donneurs volontaires qui avaient écartés pour ce motif, « leur dossier et toutes les informations sur eux seront supprimées, et s’ils se présentent en collecte ils seront considérés comme des nouveaux donneurs ». Quant aux personnes qui auraient fait des dons avant la contre-indication HSH ou bien après 2016, leur profil sera conservé mais la mention HSH supprimée.

Et les lesbiennes, c’est pour quand ?

« TOUS.TES est heureuse de cette victoire pour le droit à la vie privée et à la dignité de milliers d’hommes homosexuels et bisexuels dont l’intégralité des données personnelles ont été conservées contre leur consentement pour n’avoir fait de mal que de proposer leur aide pour sauver des vies », a réagi l’association pétitionnaire. Elle rappelait dans son argumentaire que la conservation de ces données se faisait en dépit d’une condamnation de la justice européenne, la Cour européenne des droits humains (CEDH) ayant condamné la France en septembre 2022 pour violation du droit à la vie privée. La Cour avait alors fait valoir que les données relatives aux candidats au don du sang, « sensibles », doivent être « exactes, mises à jour, adéquates, pertinentes et non excessives par rapport aux finalités poursuivies », et ne doivent par ailleurs pas être conservées plus que le temps « nécessaire ».

Dans le même temps, l’association dit demeurer « vigilante », l’EFS n’ayant pas communiqué sur le devenir des données enregistrées de la même manière sur les femmes lesbiennes jusqu’en 2002, quand celles-ci étaient exclues du don au même titre que les hommes gays. Par ailleurs, signale TOUS.TES, « les hommes transgenres ont récemment été radiés des critères de don du sang par le ministère de la Santé, sans aucune raison médicale rigoureuse ». Il s’agit toujours, font valoir les autorités sanitaires, d’un principe de précaution lié au manque de connaissance sur les effets à long terme de la testostérone dans le cas, par exemple, d’une transfusion vers une femme enceinte. Et le président de l’association, Romain François, d’observer : « Cela prouve que la considération des personnes LGBTQIA+ ne va pas encore de soi et qu’il faut se battre pour obtenir le respect des droits humains pour tous. »