NEWS
Les actualités
 d’ADHEOS

CERNAY-EN-DORMOIS (Marne). Le mois dernier, le sommeil des habitants du paisible village a été dérangé par des coups de feu au beau milieu de la nuit. Leur cible : la voiture et la maison d’un couple homosexuel sans histoires.
 
Celà fait une quinzaine de jours et pourtant c’est comme si c’était hier. Cette nuit du 15 septembre, D. et son compagnon ne cessent d’y penser. Il faut dire que ce qui leur est arrivé n’est pas anodin. En pleine nuit, un peu après 3 h 30, alors que tout le village était endormi, une déflagration a retenti juste devant leur maison.
 
« Je m’étais levé à 3 heures parce que je n’arrivais pas à dormir, raconte D. en revivant cette nuit de cauchemar. Sans trop savoir pourquoi, j’ai ouvert la fenêtre pour jeter un œil dehors mais comme il n’y a pas d’éclairage, je n’ai rien vu de spécial. Je suis allé dans le salon quand j’ai entendu mon ami hurler. »
 
Dans le même temps, un bruit énorme retentit qui donne à penser que le pare-brise de leur voiture, stationnée juste devant la maison, vient d’exploser. En fait, le coffre du véhicule vient d’être criblé de plombs de chevrotine. La gendarmerie dénombrera 27 impacts.
 
Mais ce n’est pas tout. Des plombs ont également transpercé la vitre de la fenêtre de la chambre à coucher et sont venus se loger dans le mur juste au-dessus du lit.
 
Là encore, 20 impacts sont relevés. L’instant de stupeur passé, le couple se rue à l’extérieur pour tenter de voir le ou les agresseurs.
 
« Je suis sorti quelque chose comme 4 minutes après et il n’y avait personne. Nous n’avons même pas entendu une voiture démarrer ou des bruits de pas ! En temps normal, cette route est assez passagère, là c’était le silence total », explique D.
 
Les gendarmes sont bientôt sur les lieux et, tout en effectuant les constatations au domicile du couple, patrouillent dans le village. Sur leur route, ils croiseront des jeunes du cru mais leur implication dans l’agression sera bien vite écartée.
 
L’enquête ne s’en tiendra pas là. Plusieurs jours durant, les militaires de la communauté de brigades de Saint-Ménehould entendront des témoins et confronteront les déclarations.
 
Pour eux, il s’agit de rechercher le ou les coupables de dégradations du bien d’autrui par arme à feu.
 
Pour les victimes, cela ne correspond pas à la réalité. « Nous avons porté plainte pour tentative de meurtre ! Moi, à quelques minutes près, quand je passais devant la fenêtre pour aller au salon, j’avais le cerveau plombé », s’insurge D.
 
Difficile de dire si le tir visait uniquement la voiture ou, dans le même temps, la fenêtre de la chambre à coucher. Difficile d’établir le mobile de cet acte. « Nous avons acheté la maison il y a quatre ans et nous sommes allés nous présenter en mairie. Pour éviter les cancans, nous ne nous sommes pas cachés. Nous avons expliqué que nous sommes un couple homosexuel. Avec mon ami, nous vivons ensemble depuis 14 ans. Nous avons été très bien accueillis. »
 
Acte gratuit ou agression homophobe ?
 
Pour D. et son compagnon, les relations sont globalement bonnes tant avec le village en général qu’avec le voisinage immédiat. « Nous avons des voisins qui sont chasseurs. Quand nous avons emménagé, ils sont venus nous donner un coup de main pour vider la grange. Depuis, nous sommes invités au repas de chasse et nous n’avons jamais entendu de propos déplacés. Il ne nous est pas du tout venu à l’idée que cela pourrait venir de chasseurs », affirme D.
 
Coïncidence : l’ouverture de la chasse était justement ouverte ce week-end-là. Des « braconniers » auraient-ils voulu faire un carton sur des homos ? Pour D., un acte homophobe semble le plus plausible. Afin que l’affaire n’en reste pas là, il a d’ailleurs contacté l’association Ex-Aequo de Reims ainsi que la Licra. « Nous mettrons tout en œuvre pour que les personnes qui ont fait ça soient retrouvées, assure D. Même si cela doit prendre une année ou plus, pas question d’abandonner ! »
 
Déterminé à faire la lumière sur cette affaire, le couple l’est également à rester au village. « On ne nous fera pas partir. Si ça doit arriver, c’est qu’on l’aura décidé », annonce D. Avant cette effrayante nuit, le couple n’avait reçu aucun « avertissement » sous forme de courrier anonyme par exemple.
 
En revanche, d’autres dégradations, qui n’ont peut-être aucun lien avec l’affaire, avaient été constatées. « On nous a arraché la caméra de l’interphone, le jardin a été rempli de cailloux et notre jument a été empoisonnée. Nous avons porté plainte et rempli des mains courantes à chaque fois. »
 
Un mois avant le coup de feu, ils avaient également été victimes d’une tentative de vol de carburant. Un larcin avorté grâce à l’ouïe fine des chiens qui avaient donné l’alerte alors que le ou les voleurs se préparaient à transporter 4 bidons de 25 litres de gasoil vers un bois tout proche. Le coup de fusil viendrait-il en représailles ?
 
L’affaire suscite plus de questions que de réponses. Et tout le monde se les pose, y compris les habitants du village qui voudraient savoir si le tireur est parmi eux. L’enquête suit son cours. D. et son compagnon la suivent de près. « Nous voulons savoir qui a fait ça mais plus encore que de mettre un nom sur la personne, nous voulons savoir pourquoi. »