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 d’ADHEOS

 Alors que l’on célèbre cette semaine le 30e anniversaire de la première décision de la Cour européenne des droits de l’Homme dépénalisant l’homosexualité, trois hommes ont été arrêtés jeudi dernier à leur domicile de Nicosie, rapporte le site LGBT Asylum News, alerté par des associations locales.
Ils sont suspectés de «prostitution», d’«actes sexuel contre nature» et de «conspiration en vue de commettre un crime». Les faits se sont produits sur le territoire de la République turque de Chypre du Nord (RTCN) où l’homosexualité demeure punie par la loi. 
 
«UN MOYEN DE FAIRE PRESSION»
 
Selon le Cyprus Mail, l’ancien ministre des Finances Michalis Sarris, 65 ans, fait partie des accusés. Il aurait été arrêté alors qu’il passait du bon temps en compagnie de quatre hommes, trois adolescents de 14, 16 et 17 ans et un homme d’une trentaine d’années. Mais les associations des droits humains affirment que seuls deux hommes auraient été appréhendés avec l’ex-ministre, l’un âgé de 17 ans, l’autre d’une trentaine d’année.
 
L’article 171 du Code pénal, héritage de la colonisation britannique, punit toujours les «actes sexuels contre-nature», théoriquement passibles de 5 ans de prison. Les dispositions pénalisant l’homosexualité ont en revanche été abrogées définitivement en 1998 dans la partie grécophone de l’île, qui fait partie de l’Union européenne.
 
Pour Emine Erk, la responsable de la fondation chypriote turque pour les droits humains (TCHRF), ces arrestations pourraient avoir un motif politique, la loi étant «très peu appliquée habituellement». «C’est généralement pour la police un moyen de faire pression», ces raids n’ayant rien d’«habituels», estime-t-elle, citée par LGBT Asylum News. Elle espère que l’arrestation d’une figure politique telle que Michalis Sarris pour un crime dépénalisé dans tout le reste de l’Europe va attirer l’attention des autorités sur la nécessité d’abroger cette loi.
 
DÉJÀ UNE DOUBLE-ARRESTATION EN JUILLET
 
Réagissant à ces dernières arrestations, les eurodéputés chypriotes Eleni Theocharous et Ionnis Kasoulides du Parti chrétien démocrate européen (PDE/EDP) ont dénoncé des arrestations «en complète violation du droit international et du droit humain à la vie privée». «Leur inculpation est illégale et nie leurs droits les plus élémentaires, et elle est totalement inutile car aucun mal n’a été fait», affirment les deux eurodéputés. Leur collègue, l’eurodéputé britannique Michael Cashman (par ailleurs co-président de l’Intergroupe du Parlement européen sur les droits LGBT) leur a emboîté le pas et réclame lui aussi la libération immédiates des trois hommes et l’abandon des poursuite à leur encontre. «La criminalisation de l’homosexualité n’a pas sa place au XXIe siècle», affirme le parlementaire.
 
En juillet dernier, deux hommes avaient également été arrêtés à Nicosie et détenus pendant 24 heures pour les mêmes motifs. Selon Homofobiye Karsi Inisiyatif (Initiative contre l’homophobie), une association LGBT locale citée par le site LGBT Asylum News, la presse chypriote turque relaye ces accusations dans le but de «normaliser une attitude de haine» et «nourrir les accusations et commentaires homophobes». L’association appelle «tous les citoyens concernés, les activistes et défenseurs des droits humains» à manifester «leur préoccupation» devant le tribunal de Nicosie.
 
«ACCUSATIONS SANS FONDEMENTS»
 
De son côté, Ilga-Europe dénonce des «accusations sans fondements» dans une lettre ouverte au président de la République turque de Chypre du Nord Derviş Eroğlu. L’association relève que, contrairement à ce qu’affirme la presse, «il semble que la police ne dispose d’aucune preuve de relation sexuelle entre hommes». «Par ailleurs, la législation de la République turque de Chypre du Nord n’interdit pas la prostitution et, au-delà de la définition d’un mineur comme une personne âgée de moins de treize ans, ne contient aucune autre référence à l’âge minimum du consentement pour les relations sexuelles masculines», ajoute l’association.
 
Initiative contre l’homophobie exige également l’abrogation de la loi qui réprime l’homosexualité et la mise en place de lois respectant les droits humains fondamentaux, de façon à rayer la RTCN de la liste des pays européens pratiquant «l’homophobie d’État». Depuis des années, les autorités chypriotes turques s’y refusent, rappelle l’organisation, sous prétexte que cette disposition n’est, de toute façon, plus appliquée. Les arrestations de ces derniers mois semblent indiquer le contraire.