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 d’ADHEOS

C’est la meilleure nouvelle depuis l’attaque qui a visé la rédaction de Charlie Hebdo : l’hebdomadaire satirique va « sortir la semaine prochaine », a assuré, jeudi 8 janvier, l’urgentiste Patrick Pelloux, chroniqueur du journal. Une information confirmée un peu plus tard par l’avocat du journal, Richard Malka, qui annonce que « Charlie Hebdo sortira mercredi prochain et sera tiré à un million d’exemplaires », contre soixante mille habituellement.
 
Ce sera un numéro de huit pages, a-t-il dit, au lieu de seize pages habituellement. Le journal a notamment reçu des aides des groupes Canal+ et Le Monde, a-t-il précisé. Les recettes de ce prochain numéro seront entièrement reversées aux familles des victimes, les distributeurs (kiosques, messageries… ) renonçant à leur commission. Un large appel aux dons sera également lancé vendredi.
 
Sur le site Internet du journal, un texte accompagné d’un dessin représentant une main brandissant un crayon ont été publiés jeudi soir. Annonçant la sortie le 14 janvier du « journal des survivants », on peut y lire :
 
« Parce que le crayon sera toujours au dessus de la barbarie… Parce que la liberté est un droit universel… Parce que vous nous soutenez… Nous, Charlie sortirons votre journal mercredi prochain ! »
 
« C’EST CE QUE CHARB AURAIT VOULU »
 
Autour de Richard Malka s’est tenue une réunion jeudi midi avec les « survivants » du journal. « Nous sommes encore sous le choc, mais l’important est notre décision de faire paraître le prochain numéro de Charlie. Ce numéro, c’est pour rendre hommage à ceux qui ne sont plus là. C’est ce que Charb aurait voulu », dit-il.
 
Malgré le choc, Luce Lapin, secrétaire de rédaction de longue date, résume la détermination des troupes : « On veut sortir la semaine prochaine… et les suivantes ! C’est sûr. Ils n’ont pas tué le journal, contrairement à ce qu’ils croient. »
 
Malgré les coups de fils incessants de journalistes, le manque de locaux et l’émotion, Luce Lapin, présente la veille sur les lieux du drame, s’emploie à faire avancer l’édition pour mercredi prochain, « jour de parution habituel ».
 
Dès vendredi à 11 heures aura lieu une réunion à Libération, qui a accepté de prêter ses locaux à l’hebdomadaire, comme à la fin de 2011 après l’incendie qui avait ravagé le journal.
 
UNE ÉQUIPE DÉCIMÉE
 
La question centrale est celle de l’équipe : il reste cinq dessinateurs opérationnels, dont Luz. Et Jul, qui avait quitté la rédaction mais est revenu pour aider. Riss ne peut travailler car il a été touché à l’épaule et est hospitalisé, comme les journalistes Philippe Lançon et Fabrice Nicolino, compte Luce Lapin. Parmi les journalistes et chroniqueurs valides, on trouve Antonio Fischetti, spécialiste des sciences, l’urgentiste Patrick Pelloux, Laurent Léger…
 
A la direction, on trouve Gérard Biard, le rédacteur en chef, indemne car parti en vacances à Londres et rapatrié d’urgence depuis.
 
« Nous avons besoin d’aide, dit Richard Malka. Nous n’avons plus un seul crayon, plus d’archives, d’ordinateurs, plus rien… Mais nous n’avons pas de doute sur la solidarité envers Charlie Hebdo. Elle est là. »
 
LES CONFRÈRES ET LE GOUVERNEMENT EN SOUTIEN
 
La question de la poursuite de Charlie Hebdo a été évoquée dès mercredi soir lors d’une réunion au ministère de la culture, convoquée par Fleur Pellerin, avec des représentants des médias – et consacrée également aux questions de sécurité. Puis jeudi après-midi, les directions du Monde et d’autres grands médias se sont réunies avec les équipes de Charlie Hebdo pour réfléchir aux façons d’aider l’hebdomadaire à se relancer.
 
Il a été décidé de lancer un large appel aux dons vendredi matin, qui sera relayé dans les journaux, télévisions, radios et sites d’information. L’ensemble des sommes récoltées aura pour vocation d’aider Charlie Hebdo à continuer son activité de façon pérenne.
D’autres soutiens s’organisent aussi. Plusieurs fonds d’aide à la presse et mécènes ont fait savoir qu’ils aideraient financièrement l’hebdomadaire. Divers sites Internet ont également déjà lancé des collectes de soutien tandis qu’une vague d’abonnements semble se dessiner au vu des annonces de plusieurs entreprises, institutions ou particuliers.
 
« CHARLIE HEBDO » AVAIT DES DIFFICULTÉS AVANT LE DRAME
 
Le directeur du Monde, Gilles Van Kote, a insisté sur le fait que Charlie Hebdo « doit renaître » :
 
« Il est indispensable qu’il y ait des prochains numéros de “Charlie Hebdo”. (…) Cette équipe doit se remettre debout, c’est pourquoi les médias français se mobilisent pour donner à cette équipe les moyens de reprendre son travail, avec des moyens humains s’il le faut, des moyens financiers et des locaux. »
 
Pour le secrétaire du syndicat SNJ-CGT Vire :
 
« Les directions de grands médias et le ministère ont un sursaut et tant mieux, mais “Charlie Hebdo” allait mal et avait dû lancer un appel à souscription, comme beaucoup des trop rares médias indépendants. Il faudrait par exemple réorienter les aides à la presse en faveur de ces titres pour arriver à une vraie pérennité. »
 
En novembre 2014, Charlie Hebdo, déficitaire depuis longtemps, selon Charb, avait lancé une souscription : « Je ne dis pas que nous sommes un monument national, mais nous sommes un peu le dernier vestige d’une presse indépendante », avait-il dit aux Inrocks, qui rappelaient le rôle complémentaire du Canard enchaîné et de Siné Hebdo. « Nous ne renaîtrons pas de nos cendres. Personne ne reprendra le risque de relancer un journal comme Charlie, sous cette forme. Ça ne rapporte rien », imaginait alors Charb.
 
Mais juste avant la tuerie du 7 janvier, les 200 000 euros apportés par la souscription avaient donné « une bonne bouffée d’air » à l’équipe, se rappelle Luce Lapin. Et redonné un élan que la rédaction espère retrouver.