Dans un livre d’entretien publié au Cameroun, où l’homosexualité est passible de cinq ans de prison, Jean-Blaise Kenmogne raconte pourquoi il pense que les gays et lesbiennes ont droit à l’égalité.
Entretien à bâtons rompus. D’un côté, Haman Mana, directeur de publication du quotidien Le Jour. De l’autre, le pasteur évangélique Jean-Blaise Kenmogne. Le thème de l’interview: l’homosexualité, passible de cinq ans de prison au Cameroun, pays d’Afrique centrale où les arrestations de gays et lesbiennes rapportées ont augmenté ces derniers mois.
«Un ordre clair: un homme et une femme»
«Dans la nature, il y a un ordre clair: un homme et une femme. A quoi sert-il de vouloir transformer cet ordre par des pratiques contre nature?», demande le journaliste auteur du livre Homosexualité, Eglise et Droits de l’Homme – Ouvrons le débat (éd. Ceros), qui s’est fixé la mission d’incarner le «Camerounais moyen» lors des échanges, parfois musclés.
Le docteur en droits de l’Homme répond en s’inspirant de la théologienne Isabelle Graesslé, installée en Suisse. Il rappelle ainsi que s’il y a une différence morphologique des sexes, il existe une «anthropologie de l’acceptation qui promeut soit une vision de la reconnaissance du caractère androgyne de chaque être humain en lui-même, soit une perception de la personne du même sexe comme objet d’attirance et d’amour au sens sexuel du terme».
Accusé d’empocher l’argent de «lobbys gays»
Jean-Blaise Kenmogne adhère. Pour lui, les homosexuels «ne sont ni un cancer à éradiquer, ni une menace sociale». Dénonçant les violences homophobes, il précise: «Ils sont des sujets d’humanité, des sujets de droits, des sujets de vie qu’il ne convient ni de marginaliser ni d’abandonner (…). Je dois les considérer comme des sujets humains. (…) Voilà la réalité que je cherche à comprendre et à faire comprendre parce que je constate qu’elle pose problème».
Ses propos sont très critiqués par des pasteurs et des fidèles. Certains ont même demandé sa radiation, l’accusant de fouler au pied les principes de la bible et, surtout, d’empocher l’argent de «lobbys gays». Accusation démentie: «S’il y a de l’argent en circulation, je n’ai pas vu un euro ou un dollar qui me serait destiné par des Occidentaux en vue de soutenir mon combat pour les droits humains des homosexuel-les au Cameroun».