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 d’ADHEOS

"Vivre le quotidien d’un homosexuel n L’expérience était proposée aux élus par l’association Aides n Martine Pinville et Laurent Peslerbe ont participé au jeu de rôle, hier, à Franquin à Angoulême.""
 
24 heures dans la vie d’un homosexuel. À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre l’homophobie, l’association Aides a organisé un jeu de rôle, hier à l’espace Franquin à Angoulême, pour sensibiliser aux discriminations quotidiennes qui touchent les gays et les lesbiennes. Les hommes et les femmes politiques du département étaient invités à se joindre aux anonymes. "Nous voulons qu’ils prennent position contre l’homophobie ambiante", explique Michel Bouscary, président d’Aides Poitou-Charentes. Seuls la députée Martine Pinville et l’adjoint au maire d’Angoulême Laurent Peslerbe ont accepté de se prêter au jeu. Lesbienne qui veut faire un enfant par procréation médicalement assistée, jeune homme qui annonce son homosexualité à ses proches… les participants devaient se fondre dans la peau de leur personnage. Face à eux, des bénévoles associatifs jouaient le rôle de l’employeur, du médecin, du conjoint, du parent, de l’ami… armés d’arguments culpabilisateurs.
 
Pinville dans la peau d’une militante LGBT
 
Martine Pinville est entrée dans la peau de Julie, 19 ans, une hétéro investie dans une association LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres). Objectif: montrer que ceux qui épousent la cause, épousent souvent les discriminations qui vont avec. La députée n’a pas manqué d’arguments face à ses contradicteurs. "Quand on me tient tête, ça ne me baisse pas mon moral. Au contraire, ça me donne de la force", confie-t-elle à la sortie de son entretien avec une collègue de travail peu compréhensive. Les petits sketchs avaient pour but de faire vivre aux participants les discriminations banales et quotidiennes dont souffrent les homos. Ces blagues un peu lourdes accompagnées d’un "non, mais je plaisante, tu sais bien". "Tous les scénarios sont des histoires vécues. Les profils ne sont pas caricaturaux", souligne Denis Delage, membre de l’association Aides.
 
Les élus ne sont pas sortis indemnes de l’expérience. Laurent Peslerbe jouait le rôle d’un père de famille qui trompe sa femme avec un homme. Plombé par les attaques accusatrices du médecin et du prêtre, il a terminé son parcours des sexualités avec zéro point de moral. "Dans la réalité, vous ne pourriez pas vivre dans cet état", explique Michel Bouscary, qui a rappelé que le suicide était la principale cause de mortalité chez les jeunes, et notamment les homos. "Ici, c’est facile de subir ces situations car c’est un jeu. Quotidiennement, c’est plus difficile de supporter les insultes derrière notre dos", confie Olivier, un des jeunes participants, qui a déjà subi une agression homophobe. Séduits par l’initiative d’Aides, les élus ont invité l’association à renouveler l’expérience auprès du grand public. "J’aimerais utiliser cet outil dans les quartiers, là où l’homophobie est la plus forte", propose Michel Bouscary. Prudents, les élus préfèrent se concentrer sur les lycées et les centres sociaux. 
 
 
Laurent Peslerbe, "sa réaction m’avait choqué"
 
"La personne qui m’a le plus étonné est le médecin. J’ai joué le rôle d’un père de famille qui va voir son généraliste après un rapport non protégé avec un homme dans un lieu de drague. Il était vraiment odieux car au lieu d’être dans l’empathie, il me culpabilisait. Ça m’a rappelé une anecdote. Quand j’étais directeur d’un centre de vacances, un jeune animateur a eu un rapport non protégé avec une animatrice.
 
Le jeune homme m’a demandé de l’emmener à l’hôpital. Un médecin est venu vers moi pour me dire que ce n’était pas normal d’avoir un rapport non protégé. Sa réaction m’avait choqué. L’expérience proposée par Aides était très intéressante. C’est dommage qu’on ne soit pas plus nombreux. Il faudrait généraliser le parcours des sexualités dans les lycées et les centres sociaux pour libérer la parole."  
 
Martine Pinville, "j’ai déjà subi le regard des autres"
 
"Le parcours des sexualités nous met en situation. On se met dans la peau de la victime. Les interlocuteurs nous poussent à avoir des arguments. J’ai été forte car j’ai déjà vécu ce genre de situation. Dans ma vie, j’ai déjà subi le regard des autres par rapport à mon compagnon de couleur. J’ai dû prendre les bonnes décisions. C’est frappant de voir comment le regard des gens, une simple rumeur, peut influencer nos comportements quand on n’est pas dans un cadre formaté.
 
C’est compliqué de faire accepter les différences. L’enjeu, c’est de sensibiliser et d’éduquer. Il faut sortir du cadre confidentiel pour faire participer le plus grand nombre. Allons dans les écoles, dans les lycées. Il faut une éducation plus forte à la citoyenneté. Nous avons tous une part de responsabilité. C’est un travail collectif à mener."
 
Recrudescence de l’homophobie
 
François Hollande promulguera la loi sur le mariage pour tous aujourd’hui après la validation, hier, par le Conseil constitutionnel (page 59). Une bonne nouvelle pour les couples homosexuels qui subissent une recrudescence des actes homophobes. La Charente ne fait pas exception. "La parole homophobe s’est libérée avec le débat sur le mariage pour tous car elle est encouragée par certains hommes et certaines femmes politiques", pense Michel Bouscary, président de l’association Aides Poitou-Charentes. SOS-homophobie a publié son rapport annuel mardi dernier.
 
Selon l’association, l’homophobie explose. Elle a recueilli 1 977 témoignages de victimes de discrimination en 2012, contre 1 556 en 2011 et 1 483 en 2010. Les actes et les paroles homophobes ont surtout lieu sur internet (35 % des cas recensés), au travail (10 %) et dans la famille (10 %). Ils se matérialisent par des insultes (44 %), des discriminations (16 %), des menaces (14 %) et du rejet (13 %). "La pire des violences, c’est de légitimer les actes homophobes en rejetant la faute sur les homosexuels.
 
Les bourreaux se font passer pour les victimes", estime Michel Bouscary.