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 d’ADHEOS

La communauté LGBT+ de Hong Kong se rallie à contrecœur à un projet gouvernemental visant à étendre les droits des couples de même sexe, des militants résignés abandonnant leur idéalisme dans l’espoir d’une rare victoire législative.

Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ? À Hong Kong, les associations LGBT+ se sont résignées ces dernières semaines à soutenir un projet du gouvernement visant à octroyer quelques droits aux couples de même sexe mariés à l’étranger. Le but : arracher une rare victoire sur le front législatif dans un pays qui ne reconnaît pas légalement les couples homosexuels.

En 2023, la plus haute cour de la région méridionale chinoise a considéré que le mariage ne devait être accessible qu’aux couples constitués d’un homme et d’une femme. Elle a dans le même temps sommé le gouvernement de créer, avant octobre 2025, un « cadre alternatif » afin de reconnaître les droits des couples de même sexe. Les autorités ont ainsi annoncé en juillet un projet de loi qui recouvre des questions liées à la santé et au décès, comme le droit de visite à l’hôpital ou la réclamation du corps d’un défunt. Ce texte ne doit toutefois s’appliquer qu’aux couples unis à l’étranger et il ne prévoit aucun droit au mariage ou à l’adoption, ni d’accès aux prérogatives réservées aux époux, comme la visite d’un conjoint emprisonné. Le texte donner lieu à des débats au Parlement avant un vote, probablement après les vacances parlementaires d’août.

« C’est mieux que rien »

Même ultra-limité, le projet de loi constituerait un pas en avant pour l’égalité devant la loi, ce qui incite des militant·es LGBT+ à appeler la communauté au pragmatisme. « Soit nous acceptons une proposition discriminante (…), soit nous prenons le risque de ne rien avoir du tout », a ainsi déclaré à l’Agence France-Presse l’artiste non-binaire Holok Chen (à g. sur la photo), qui a pris la parole lundi contre l’homophobie devant un bureau d’enregistrement des mariages.

« C’est mieux que rien », plaide également Ray Yeung, le réalisateur du film Tout ira bien (2024), qui aborde le casse-tête administratif des couples de même sexe hongkongais face à la maladie et la mort. Estimant « déraisonnable » que le gouvernement précipite le processus parlementaire, le cinéaste souligne néanmoins que « si votre partenaire est malade ou s’apprête à mourir, dans une certaine mesure, (le texte) peut vous aider, il procure un strict minimum en matière de droits. »

Yan Ng, cofondatrice du groupe de défense des droits Dear Family Hong Kong, regrette « une demi-mesure » et appelle auprès de l’AFP le gouvernement à proposer « un système plus inclusif ». Mais seuls 12 députés ont dit publiquement soutenir le texte, selon le décompte du quotidien hongkongais Ming Pao. Professeure à l’Université de Denver aux États-Unis, Kelley Loper s’attend « à ce que les tribunaux déterminent in fine » que le texte est « insuffisant » et ses vides juridiques « inconstitutionnels ».

La Chine écrase le Hong Kong LGBT

À Hong Kong, une étude a établi en 2023 que 60% des habitants soutenaient l’ouverture du mariage à tous les couples. Mais les associations et figures de la communauté LGBT+ peinent à se mobiliser autour d’un texte qui n’a d’ailleurs donné lieu à aucune consultation publique. « Les mobilisations étaient autrefois particulièrement visibles parce que nous avions un espace pour parler (…) Nous ne pourrions probablement pas faire cela maintenant », observe Sean Hau, autre confondateur de Dear Family Hong Kong. Des Prides s’étaient en effet déroulées à Hong Kong à partir de 2008, mais Pékin a pris des mesures contre les libertés politiques dans le sillage des immenses manifestations pro-démocratie de 2019, parfois violentes, qui ont secoué l’important centre financier.

Lundi, la police a ainsi surveillé étroitement l’artiste Holok Chen lors de sa prise de parole. Quelques jours plus tôt, des agents l’avaient emmené avec eux après le déploiement d’un drapeau arc-en-ciel à l’extérieur du Parlement. À défaut de rassemblement possible, les militants se sont donc tournés vers des pétitions en ligne et des courriers aux autorités, comme HKSpectrum qui agit depuis 2021 auprès des jeunes Hongkongais LGBT+. Reste que le projet de loi, qui aborde surtout les droits relatifs à la santé et au décès, ne mobilise pas beaucoup les jeunes sur les réseaux sociaux.