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 d’ADHEOS

En France, le débat autour de la PMA a été remis au goût du jour avec la récente annonce du gouvernement Macron de l’étendre à toutes les femmes. Un sujet dont la Manif pour Tous n’a pas tardé à s’emparer en vantant le modèle "traditionnel". Mais d’après une récente étude, rien ne prouve que l’enfant soit plus malheureux en grandissant au sein d’une famille "non-conventionnelle".
 
Invité sur France 2 ce jeudi 28 septembre dans l’"Émission Politique", le Premier ministre Édouard Philippe s’est dit favorable à l’ouverture de la Procréation médicale assistée (PMA) pour toutes les femmes, y compris les homosexuelles et les célibataires, comme l’a récemment annoncé la ministre chargée du l’Egalité femmes-hommes Marlène Shiappa. Si la date d’application de cette mesure demeure très floue, il n’en a pas fallu plus à la Manif pour Tous pour monter au créneau. Le mouvement conservateur- qui s’était déjà opposé au "Mariage pour tous" en 2012– se dit donc prêt à tout pour combattre "la PMA pour toutes". L’un de ses arguments phares : privé de figure paternelle, l’enfant sera malheureux.
 
Or, les recherches de la professeure anglaise en psychologie Susan Golombok- directrice du Centre Family Research de l’Université de Cambridge- démontrent justement que les enfants issues de familles "non-traditionnelles", y compris ceux issus d’une PMA, ne se portent pas plus mal que les autres. Alors qu’elle présentait début septembre son étude lors du 15e Congrès de la Société suisse de psychologie, celle-ci a affirmé : "De nombreuses personnes pensent que plus un modèle familial dévie de la norme, plus l’impact sur l’enfant sera négatif. Cette opinion est basée sur des préjugés. Le besoin de résultats empiriques est crucial pour être au clair avec ces situations", rapporte Le Temps.
 
Grandir dans une famille monoparentale ne nuit pas à l’identité sexuelle de l’enfant
 
En se basant sur des études universitaires publiées au cours de ces 40 dernières années, Susan Golombok a passé au peigne fin les enfants de 84 familles à travers le monde entier, notamment des États-Unis, de la Belgique, d’Allemagne, des Pays-Bas et de Grande-Bretagne. Les recherches ont porté à la fois sur les familles monoparentales par choix, les parents homosexuels, les enfants issus de PMA et de Gestation pour autrui (GPA), ainsi que les parents transgenres. Et les conclusions de la chercheuse sont unanimes : ce n’est pas parce qu’un enfant est issu de ses nouvelles structures familiales que son identité sexuelle ou son bien-être s’en trouve perturbé.
 
"Les garçons ne sont pas moins "masculins" en termes d’identité et de comportement, et les filles ne sont pas moins "féminines", lorsqu’elles grandissent avec des parents d’un seul ou même genre", expliquait-elle en 2015 à The Independent. De quoi tordre le cou aux stéréotypes de genre chez les enfants.
 
Le Pr Golombok va encore plus loin dans ses analyses. Selon elle, certains enfants issus de ces familles se porteraient parfois mieux que les autres. Cette experte a par exemple constaté qu’à partir de l’âge de 10 ans, les enfants qui ont deux mères présentent moins de problèmes émotionnels et comportementaux que les autres enfants du même âge élevés dans le cadre d’une famille traditionnelle. "À 17 ans, ces enfants présentaient des aptitudes élevées, aussi bien en terme de sociabilité que de résultats académiques", a précisé le Pr Golombok. "Le profond désir des parents de fonder une famille peut expliquer la qualité du rapport qu’il entretient avec son enfant. Il se sent désiré et valorisé, ce qui influence son développement de manière positive", a-t-elle ajouté.
 
 
Un avis plus mitigé concernant la GPA
 
Les familles dites "non-traditionnelles" ont émergé dans les années 1970 au sein de nos sociétés occidentales. Si Susan Golombok observe une nette augmentation de ces nouveaux modèles au fil des ans, elle note cependant une peur de l’inconnu qui perdure au sein de nombreuses familles. "Les gens ont souvent peur de ce qu’ils ne connaissent pas ou de ce qui n’entre pas dans la "norme". Mais il suffit parfois qu’un individu soit concerné par le sujet pour qu’il change d’avis. Par ailleurs, plus la réalité de ces familles non-traditionnelles sera portée à la connaissance du grand public, plus elle aura des chances d’être acceptée", estime-t-elle.
 
La professeure fait cependant preuve de prudence et dénote quelques points négatifs dans les résultats de son étude, notamment en ce qui concerne la GPA, pratique légalisée au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. "A l’inverse du Royaume-Uni, les Etats-Unis ne limitent pas le nombre d’enfants conçus par donneur. Cela signifie qu’un enfant peut se retrouver avec des dizaines de demi-frères ou demi-soeurs. Dans ces cas de figure, il faut penser à eux : pour certains, la découverte du nombre peut constituer un choc. De plus, le père biologique ne voudra peut-être pas tous les rencontrer", prévient-elle.
 
Et en France ?
 
Selon une étude de l’INSEE dévoilée en mai 2017, un quart des enfants est élevé en famille monoparentale, principalement par leur mère, "car les unions sont devenues plus fragiles". En ce qui concerne la PMA, les enfants conçus par le biais de cette pratique ont représenté 3,1% des enfants nés en 2014, soit 25 208 enfants, selon l’Agence de la biomédecine. Un nouveau-né sur 32 est issu d’une PMA. La GPA demeure quant à elle strictement interdite en France.
 
En France, le manque de recul et le peu d’études réalisées à ce sujet rendent difficile d’affirmer si les enfants privés d’une structure familiale "traditionnelle" sont plus heureux (ou plus malheureux) que les autres. "Ces familles (…) sont inscrites dans des réseaux de parenté et des entourages plus larges et ne viennent pas bouleverser les grands principes inhérents aux représentations occidentales de la parenté", a toutefois constaté une étude de l’Association française de sociologie dévoilée en 2014.