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 d’ADHEOS

Nous sommes début novembre, ce qui veut dire pour les Américains, le jour des élections. S’il y a des élections diverses et variées à tout moment de l’année, le mardi suivant le premier lundi de novembre est important parce que depuis 1845, quand une loi fédérale fixait ce jour pour l’élection présidentielle tous les quatre ans, on a pris l’habitude d’organiser la plupart des scrutins le même jour, tous les ans. (Pourquoi ce jour là ? Sans doute parce que les récoltes étaient terminées, mais il ne faisait pas encore assez mauvais temps pour se déplacer aux bureaux de vote.)
 
Cette année il n’y a pas d’élection présidentielle, car on est à la fin de la deuxième année du deuxième mandat de quatre ans du président Obama. C’est pour ça qu’on ces élection des années paires non présidentielles les « mid term elections », les scrutins de mi-mandat présidentiel. Bien entendu, les années des présidentielles voient le plus d’intérêt, mais les mid-terms ne sont pas loin, car au niveau fédéral l’ensemble de la chambre des représentants est renouvelé, ainsi qu’un tiers du sénat.
 
Alors, quels sont les enjeux pour les LGBT lors de ces élections ?
 
Au niveau fédéral les enjeux sont limités. La chambre est déjà à droite et le restera, et au sénat, les Démocrates risquent fort de perdre leur petite majorité. Comme lors de chaque fois qu’il y a des mid-terms, il y tendance pour le parti du président à perdre des sièges, donc la question qui se pose, c’est l’échelle de la déculottée pour les Démocrates. Cela dit, les Démocrates pourraient garder le contrôle du Sénat de justesse, et les LGBT pourraient y jouer un rôle. L’une des surprises de cette campagne est la candidature de Michelle Nunn, fille d’un ancien Sénateur de la Géorgie, est qui représente un vrai espoir pour les Démocrates de reprendre un siège républicain. Or, la Géorgie est un état conservateur, et Nunn a déçu un certain nombre d’électeurs LGBT, qui d’habitude préfèrent les Démocrates et les gratifient de leurs voix et de leurs dons, en refusant de soutenir le mariage pour tous. Tout comme Jason Carter, candidat démocrate au poste de gouverneur, et lui même fils d’un ancien gouverneur et ancien président au nom de Jimmy Carter, elle n’a pas obtenu le soutien du grand journal LGBT d’Atlanta, car les deux candidats ont snobé ce journal et ont refusé de prendre part à la marche des fiertés de la ville.
 
Les questions LGBT au niveau fédéral sont un peu au point mort, ce que l’on peut voir à travers deux dossiers très importants, le mariage et la discrimination. Pour ces questions, le jeu ne se passe pas ou peu à la législature. Le mariage se joue désormais dans les tribunaux fédéraux, où la tendance est très forte d’étendre le mariage pour tous à tous les états. C’est la suite logique de la décision de la Cour suprême d’invalider la loi DOMA qui refusait la reconnaissance du mariage pour tous au niveau fédéral et entre états. Le raisonnement juridique de cette décision s’applique aussi aux lois et aux constitutions des états, d’où une vague de décisions favorables à l’égalité. Et jusqu’ici la Cour suprême à préféré laisser faire, ce qui veut dire que sans coup de théâtre, il est quasi inévitable que le mariage pour tous devienne la loi pour tout le pays. Et pendant encore deux ans, l’administration Obama va suivre la tendance, étendant à chaque état où le mariage pour tous existe les avantages du régime matrimonial au niveau fédéral.
 
Pour ce qui est de la protection contre la discrimination, il s’agit de la loi ENDA, pour laquelle il y avait quelques espoirs lors de la mandature actuelle. Mais malgré beaucoup de compromis, cette loi qui devait interdire la discrimination contre les gays et lesbiennes dans l’emploi n’a pas abouti. Et dans le prochain congrès qui sera encore plus à droite que l’actuel, une telle loi n’est pas près de voir le jour lors de la mandature prochaine. Mais ce n’est pas sûr que ce soit une mauvaise chose que cette mauvaise loi passe. Déjà les parlementaires qui proposaient cette loi refusaient d’inclure les trans, afin d’améliorer ses chances d’être votée. Ensuite, des dérogations à gogo ont été introduites pour amadouer les religieux. Or, avec les récentes décisions absurdes de la Cour suprême sur la liberté religieuse, notamment en étendant aux sociétés anonymes un droit à la croyance religieuse, les défenseurs de l’égalité ont estimé qu’une telle version d’ENDA n’offrait aucune garantie aux personnes gaies et lesbiennes, sans parler des trans, le dindons de cette farce.
 
A revoir dans deux ans, et seulement si les Démocrates conservent la présidence et reprennent des sièges aux deux chambres du Congrès, ce qui semble possible.
 
Mais il n’y a pas que les législatives fédérales cette année : il y a des élections au niveau des états, pour leur gouverneurs et leurs législatures, et au niveau local, municipalités et autres collectivités locales, les intercommunalités, les autorités diverses et variées. Même lors de mid-terms on peut voter pour des dizaines de postes, sans parler des propositions et référendums populaires, parfois aussi au nombre de dizaines. Dans ces entités, il y aura de vrais enjeux, mais au vu de leur multiplicité, ils sont difficiles à repérer. De ce fait, nous parlerons de quelques tendances générales.
 
Au niveau des états que se jouent beaucoup de dossiers importants. Pour ce qui est du mariage, c’est foutu pour eux tout comme pour la législature fédérale, mais pour ce qui est de la discrimination, c’est une question brûlante. On a vu, par exemple, des états qui ont interdit aux collectivités locales d’inscrire dans leurs arrêtés municipaux la non discrimination à titre de l’orientation sexuelle. C’est à dire que les états avec une majorité parlementaire de droite interdisent aux collectivités de protéger les LGBT. C’est assez insensé : les conservateurs qui prônent un gouvernement minimaliste qui respecte le droit des individus et des collectivités qui lui sont subordonnées veulent interdire l’interdiction de discriminer. On a vu aussi dernièrement des droits autorisant explicitement la discrimination homophobe pour des motifs religieux, par exemple dans l’Arizona. Mais globalement le risque le plus fort, c’est pour les femmes.
 
La Cour suprême a trouvé il y a 40 ans que l’accès à l’avortement était un droit constitutionnel, mais depuis quelques années, la Cour actuelle, bien plus à droite, donne son aval aux attaques sournoises contre ce droit, notamment celles votées par les états conservateurs. Il s’agit par exemple d’imposer aux cliniques les obligations propres au bloc opératoire d’un hôpital, ou obliger aux femmes cherchant une IVG un délai de réflexion. Mais ça ne concerne pas seulement l’avortement, mais aussi l’accès à la contraception, ou des questions comme l’éducation à la sexualité.
 
Vus de l’Europe, on se focalise sur le gouvernement fédéral, avec des correspondants localisés à Washington ou New-York. Il ne faut certes pas négliger le niveau fédéral, mais les blocages sont tels qu’il y a peu de chances que les choses changent pour le bien ou pour le mal. Il faut que le président Obama soit beaucoup plus affirmatif dans la désignation des juges fédéraux, qui restent en place à vie. Mais surtout, il faudra que les LGBT et leurs amis qui votent soient attentifs aux autres scrutins de demain.