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 d’ADHEOS

Les salariés protestent ce jeudi contre la gouvernance de la direction, alors qu’un déménagement hâtif a également provoqué l’arrêt du site de l’association. Une demande de liquidation judiciaire vient d’être formulée au tribunal de Paris.
 
«Pour des raisons indépendantes de notre volonté, nous ne pouvons donner suite exceptionnellement à votre appel», voici le message entendu ce jeudi en composant le 0 800 840 800, numéro vert de Sida info service. Alors qu’une demande de liquidation judiciaire a été déposée au tribunal de grande instance de Paris concernant SIS Réseau, l’une des entités de l’association, près des deux tiers (62%) des salariés ont décidé de faire grève ce jeudi. Une protestation pour «dénoncer la gestion hasardeuse d’une gouvernance à la dérive», indique un communiqué commun de Sud, du comité d’entreprise et du CHSCT. La direction étant à l’origine de lacunes dans la gestion de l’association, comme l’avait révélé Le Figaro en mars dernier.
 
Le site inaccessible depuis 10 jours
 
En redressement judiciaire depuis février dernier, ce service historique d’accompagnement des séropositifs fait face à des difficultés financières. À la demande de l’administrateur judiciaire, la direction a diligenté un changement de locaux de son antenne francilienne, pour réaliser des économies sur le loyer. Le 14 juin dernier au soir, les salariés ont appris qu’ils devaient faire leurs cartons pour un déménagement… à peine six jours plus tard. Le transfert d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) à Pantin (Seine-Saint-Denis) fut hâtif, mais le dicton «vite fait, bien fait» n’est pas toujours vérifié.
 
«On est arrivé lundi matin dans les nouveaux locaux, il n’y avait pas d’ordinateurs et les lignes de téléphone n’étaient pas activées», raconte un salarié. Pire, le bâtiment n’est pas équipé «des raccords nécessaires pour installer les serveurs», poursuit-il. Résultat, alors que la direction avait prévu une coupure de trois jours, le site «sida-info-service.org» est inaccessible depuis dix jours! «C’est un problème technique, les opérateurs se renvoient la faute. Cela n’a rien à voir avec le déménagement en lui-même», assure Patrice Gaudineau, directeur général de l’association. Il faudra attendre encore quelques jours avant de retrouver l’accès au site.
 
Cette plateforme en ligne est pourtant tout aussi importante que la ligne téléphonique. Que ce soit par le forum ou le chat, les salariés de Sida info service échangent avec les malades aussi sur internet. Plus de 21.000 entretiens sont réalisés chaque année par ces procédés. Concernant les appels, l’association ne peut couper le service, condition de la subvention de l’État de 5 millions d’euros (soit plus de 90% de son budget).
 
Depuis le déménagement, et en attendant l’ouverture des lignes franciliennes, les centres d’appels de Grenoble et Montpellier ont récupèré la charge de travail. Pourtant, les heures d’écoute sont souvent en dépassement à Paris. Le non-fonctionnement des serveurs prive également les salariés de l’annuaire de Sida info service, qui regroupe les services vers lesquels ils renvoient les malades (hôpital, centre de dépistage, etc.).
 
Les questions de réseau ne sont pas la seule préoccupation des salariés. La conservation des archives durant le transport fait également l’objet d’inquiétudes. Créée en 1990 à l’initiative de Pierre Kneip, ancien membre d’AIDES et cofondateur de Sidaction, Sida info service est riche de plusieurs millions d’entretiens téléphoniques. «Dans un premier déménagement, en décembre 2014, on avait perdu des archives», confie un écoutant, alors que celui-ci s’était pourtant déroulé plus sereinement.
 
Ce second déménagement, cumulé avec les problèmes financiers, fait craindre aux salariés une baisse de la qualité de leur service auprès des malades et de la réputation du numéro vert. «Il y a toujours eu un consensus de tous bords politiques sur l’utilité du service. Aujourd’hui il s’agit d’un processus de mort, de destruction à la fois de la qualité et de la mémoire de Sida info service», estime un écoutant. Sida info service est pourtant reconnu pour son expertise. «Au congrès de la Société française de lutte contre le sida, tout le monde a plébiscité notre expertise. Au moment où on montre le plus la preuve de notre pertinence, on détruit l’outil», déplore un salarié.
 
La demande de liquidation judiciaire, déposée ce jeudi par l’administrateur judiciaire, propose le départ de 17 salariés dont le directeur général de l’association, Patrice Gaudineau. «En ce qui me concerne j’ai rempli ma mission depuis longtemps», confie-t-il, rappelant la période de restructuration de la fin des années 2000. «La démonstration a été faite qu’il n’y a eu aucune faute de gestion, mais un problème de financement», poursuit-il. L’État ayant réduit la subvention de 7 millions à 5 millions d’euros en dix ans. La juge donnera sa délibération le 7 juillet prochain.